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De l’industrialisation de la carrosserie.

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De l’industrialisation de la carrosserie.

 

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                                                                                      Berline de 1735

Jusqu’au 18° siécle, l’essentiel de la clientèle des carrossiers était composé de membres  de l’aristocratie. La carrosserie de luxe fabriquait, à partir d’une esquisse, des voitures sur mesure portant la marque du goût des acquéreurs. Au 19°, les transformations économiques et politiques amenèrent une nouvelle clientèle composée de la haute bourgeoisie enrichie par le commerce, l’industrie ou la finance. Cette nouvelle clientèle délaissa carrosses et berlines pour des voitures plus pratiques, rapides, confortables, sportives,… Mais les exigences de qualité de cette nouvelle clientèle restèrent  les mêmes. La voiture était un indicateur de la réussite sociale. La carrosserie française y répondit par l’innovation et la recherche de la qualité au point d’être reconnue comme l’égale de la carrosserie anglaise.  img646-copie-1

                                           Coupé huit ressorts à la Daumont de 1872

Le  mode d’organisation classique, liant sous-traitance ou co-traitance (voir article Evolution de la carrosserie au 19°...,les débuts de « Binder »/1 ), perdura chez un grand nombre de fabricants. Parallèlement, de grands carrossiers, pour augmenter le contrôle de l’ensemble du processus, regroupèrent en un seul lieu les différents métiers nécessaires à leur activité. Peu courante au 18° (hormis quelques exceptions comme Simons en Belgique vers 1770 ou John Hatchett à Londres  en 1786), ce mode d’organisation se développa dans la première partie du 19°. Ce nouveau fonctionnement fut choisi par des maisons emblématiques ; Binder, Muhlbacher, Belvalette.. Il permettait de faire du sur mesure, tout en ayant des « prototypes » que l’on pouvait ainsi, sur place, adapter rapidement aux goûts de l’acheteur. Expositions, magasins et catalogues permettaient de présenter, chaque année, de nouveaux modèles de base, à la mode du moment. 

Dans les deux modes d'organisation, cette carrosserie de luxe garda des techniques de productions manuelles traditionnelles, s'appuyant sur le savoir faire de professionnels hautement qualifiés, et mettant en oeuvre des matières premières de trés grande qualité et valeur.

"Au point de vue des moyens de production, les méthodes de travail, dans la carrosserie de luxe, sont, en général, ce qu'elles étaient au commencement de ce siècle. A part quelques maisons importantes qui possèdent, en petit nombre, quelques machines-outils mues par moteur mécanique le travail se fait à la main. Celà se conçoit si l'on se rend compte que la carrosserie de luxe est essentiellement une industrie d'art dans laquelle la nécéssité de satisfaire les caprices d'une clientele exigeante ne permet pas l'application du travail en série, le seul dans lequel l'emploi des machines soit réellement utilisable et économique." Rapportsur l'exposition universelle de 1900.

 L’outillage était donc essentiellement manuel.

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                                                     Matériel de charronage

 

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                                                                    Outillage manuel fabrication rais

Dans le même temps, le développement économique entraîna d’autres besoins en moyens de transport. Les transformations  industrielles  s’accompagnèrent d’une mutation radicale de la société et des rapports économiques et sociaux. En fait, la traction animale fut un des piliers du développement du capitalisme industriel. Des masses de population se déplacèrent de la  campagne vers les centres de production, avec de  nouvelles problématiques de logistique, d’approvisionnement et de transport. Les volumes de production augmentèrent rapidement (Faure déclarait en 1835 que, "depuis la fin de l’empire, le nombre de voitures avait été multiplié par vingt"). La renommée des voitures françaises entraîna, de plus, un développement de l’exportation. "..d'aprés les documents de l'administration des douanes françaises, les valeurs authentiques en francs de l'exportation à l'étranger pendant une période de huit années (de1856 à 1863) des voitures suspendues fabriquées en france est de 24793971 francs; c'est plus de trois fois la valeur de la période précédente de 1848 à 1855." (GDC Brice Thomas)

 La machine à vapeur accéléra cette évolution :

                        Le chemin de fer transforma totalement l’organisation des transports et augmenta de façon exponentielle les besoins en desserte locale.

                        Les nouvelles machines, mues par la vapeur, transformèrent radicalement l’organisation de la production.

        amg282.jpg               Machines à Vapeur verticales présentées à l'exposition universelle de Vienne

Les transports publics, le transport de matières premières ou manufacturées, le besoin en voitures de commerce, nécessitaient une construction de masse de voitures à des coûts abordables. Une section voitures de service existait dés l’exposition universelle de 1867. Cette évolution donna naissance à de nouvelles approches de la carrosserie adaptées aux activités de transports visées. 

Le développement de machines outils actionnées par des machines à vapeur permit dans un premier temps aux sous-traitants d’accroitre la production liée aux travaux de forge, de métallerie, de quincaillerie,…

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322 - GDC 1911 030 Cette photo prise à Chaudesaigues, nous montre en bas à droite, une roue avec son demi essieu que le charron vient de recevoir par la diligence (patache) et ranger devant son atelier. Les entreprises comme Lemoine avaient également dans leurs catalogues  des trains avant complets.

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 Cette mécanisation s'étendit à d'autres soustraitants

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Ces publicités datant des premières année du XX° montrent également l'adaptation de cette sous- traitance à la production automobile.

Dès la fin des années 1840, le processus d’industrialisation des entreprises de carrosserie elles mêmes se développa tout particulièrement dans le secteur des voitures de service, pour  exploser dans le dernier quart du siècle. L’utilisation de la machine à vapeur permis d’augmenter la capacité de production des machines existantes mais amena la création de nouvelles machines outils; Dés 1848 des scies pour le chantournement des bois, pour le débitage des grumes en planches, étaient opérationelles: "M. Périn est le premier qui soit parvenu à employer d'une manière pratique les scies à lame continue, et depuis 1848 il se sert commercialement, et avec avantage de cet appareil....il a le mérite d'avoir appliqué au chantournement des bois une invention qui jusqu'à lui était restée stérile."extrait rapport de l'exposition universelle de 1855.

Ultérieurement apparurent des machines à produire les rais en série, à cintrer les bois, raboteuses, mortaiseuses,....(compte rendu section machine outil à l'exposition universelle 1878).voici quelques unes de ces machines exposées à l'exposition universelle de vienne en 1873. 

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                               Machines outils présentées en 1873 à l'exposition universelle de Vienne

Les cadences augmentèrent et les tâches se diversifièrent, le compagnon charron laissait la place à des ouvriers rassemblés dans des centres de production; les usines. Dans le même temps, cette mécanisation permettait la production de petites séries, la confection de pièces communes à plusieurs modèles de voitures. L’ensemble permettait de réduire les coûts, tout en augmentant considérablement la capacité de production. En termes de gestion, l’entreprise familiale typique des carrossiers laissait la place au capitalisme industriel.

Nous vous proposons d’examiner les motifs et modalités  de cette évolution au travers de différentes entreprises. L'un des premiers secteurs qui s'interessa à la modélisation des voitures et à la mécanisation de leur production fut celui des transports publics.

Sociétés de transports publics:

 La compagnie générale des omnibus 

Omnibus on the Place de la Madeleine

A sa création en 1855, l’entreprise reprenait le service de 25 lignes assurées par 340 voitures lourdes et de faible capacité; 14 passagers .

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La nécessité de créer de nouvelles voitures plus grandes et plus légères, d’en faciliter les travaux de maintenance, amena la CGO à créer ses propres ateliers. Dès 1862, la CGO possédait 540 voitures d’un nouveau type assurant  le transport sur 31 lignes. Les voitures transportaient 14 personnes à l’intérieur et 14 personnes sur l’impériale.

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Voici le détail de l’organisation des ateliers, présenté dans le livre les grandes usines de Turgan 1863.

« Les ateliers de construction de la compagnie sont situés rue des poissonniers, à la chapelle Saint-Denis ; ils occupent près de 500 ouvriers. D’énormes approvisionnements d’ormes, d’acacias et de chêne y sont débités et préparés à l’avance pour acquérir la siccité nécessaire  à la construction des voitures. Des tours, des machines à raboter et à tarauder, de belles scies Perrin à lames continues, tournent les moyeux, aplanissent les jantes, percent les mortaises, débitent les planches qui doivent servir à la caisse. Une autre machine, très ingénieuse et presque en tout point semblable à celle qui tourne les crosses de fusil, prépare les rais….. Quand à la serrurerie, elle se fait en grand avec les moyens actuels d’exécution, marteau pilon et machines de toute sorte.

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Les essieux coudés sont en fer du Berry, les ressorts en acier de Saint-Etienne, les panneaux  de la caisse en tôle d’un millimètre un quart d’épaisseur. On emploie pour cercler les roues d’anciens bandages de locomotive ou de wagons qui peuvent seuls résister à l’usure du sol parisien. »

Toutes les voitures sont faites sur le même modèle approuvé par l’autorité municipale. A ces ateliers est joint un bureau d’études qui travaille à l’amélioreration  continuelle des voitures. Dès 1867, jantes, rais, moyeux ne sont pas simplement fabriqués mais aussi "assemblés à la mécanique".  Cette année là, les ateliers fournissent annuellement 500 voitures .

La CGO obtint régulièrement des prix aux expositions universelles françaises et étrangères. «Le type le plus remarquable est celui qui a été exposé par la Compagnie générale des omnibus de Paris» (rapport exposition universelle de 1867). Tous les rapports de cette exposition mettent en avant les efforts de recherche et la qualité des matières premières utilisées.

L’entreprise avait également ses propres ateliers de bourellerie  

 

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                                                              Harnais de la CGO (collection R.Fabre)

qui bénéficiaient des mêmes efforts de recherche comme ce collier métallique dit "élastique".

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Collier "élastique" avec deux anneaux permettant de fixer les traits d'un cheval de renfort

(collection R Fabre)

 

 La compagnie générale des voitures

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Nous retrouvons ces caractéristiques de production dans la compagnie de voitures de remise (voitures louées pour des périodes déterminées;de quelques heures à quelques mois)  la plus connue de la place de Paris.  « La Compagnie générale des voitures ». Elle avait aussi, comme la CGO, ses propres ateliers qui assuraient la création et l’entretien des voitures, de la bourellerie,…

Dans des exploitations de ce genre, le chapitre traction occupe au budget des dépenses la place la plus importante: il faut réduire le coût d’achat et celui de la nourriture de la cavalerie, donc acheter une cavalerie légère et construire des véhicules adaptés. Le succès de l’entreprise dépend de l’étude du matériel et les travaux de recherche étaient très poussés à la CGV, comme le montre ce tableau de la répartition des poids sur une voiture. Elle devait aussi prendre en compte les attentes de la clientèle. Le rapport de l’exposition universelle de 1778 nous donne une idée plus précise de la démarche de l’entreprise. 

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  La présence dans le conseil d'administration de la CGV de membres éminents de la carrosserie Parisienne a surement eu une influence sur la politique de cette entreprise. "Louis Binder (excellente continuation après avoir quitté Binder Frères) et Maurice Bixio furent tous deux administrateurs de le Cie Générale des Voitures de Paris, et plus tard également Maurice Binder, fils de Louis ; tous trois ont été Conseillers Municipaux de la Ville de Paris, ce qui donne un connotation sur les transports parisiens." Information de de JP Binder

 

Pour répondre au développement exponentiel dans d’autres secteurs d’activités, des entreprises organisées sur le même modèle se développèrent. Nous vous les présenterons dans le chapitre suivant.

 

 

Texte: Figoli

 

Documentation: Figoli, H.B.P, Henri Baup, R. Fabre,R. Senseby, J.P. Binder.

 

Bibliographie: Rapports exposition universelles 1855-1900, Les grandes usines de   Turgan 1863, Voitures et carrossiers aux XIX et XIX siècle de C.Rommelaere,Le cheval è Paris de G Boucher, Rapport de la société des ingénieurs civils 1779, Rapport exposition de Vienne 1873,....

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