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« Où sont les mules de Réjane ? »
Les voitures de Madame Réjane la plus
parisienne des comédiennes
Jean-Louis Libourel
Les femmes ont été les premières à apprécier le confort et le luxe des voitures. Pour ces élégantes et délicates passagères, les carrossiers ont donné aux voitures qui leur étaient destinées un plus grand confort et un plus grand raffinement intérieur : tissus précieux, couleurs assorties avec soin, finitions impeccables, abondance de poches et rangements divers pour loger toutes sortes de petits objets indispensables aux voyageuses, cantines agrémentées de miroirs et de petits nécessaires, bouillottes, chaufferettes, petits vases à fleurs etc.
Dans son numéro du 15 septembre 1901 le journal professionnel La Carrosserie Française, en publiant les descriptions et les dessins réalisés par Louis Lagard de deux voitures créées par la maison de carrosserie Bail aîné à Paris pour la célèbre comédienne Réjane, livre un témoignage irremplaçable sur ces voitures de femmes, élégantes et raffinées.
Le Cab et le Char-à-bancs construits en 1901 pour la comédienne Réjane. Dessins de Louis Lagard (La Carrosserie Française, 15 septembre 1901)
« La plus parisienne des comédiennes »
Gabrielle-Charlotte Réju, dite Réjane, est née le 5 juin 1856 à Paris. Elle y décèdera le 14 juin 1920. Elle fut, avec Sarah Bernardt, l'une des comédiennes françaises les plus populaires du début du XX° siècle.
Souveraine incontestée du genre comique et brillant, mais aussi fine interprète dramatique, Réjane a été la reine du Boulevard, « la plus parisienne des comédiennes » (Le Petit Parisien, 1899).
Entrée au Conservatoire d’art dramatique à quinze ans, elle y gagne le second prix d’interprétation en 1874. Quatre ans plus tard, grâce à Coquelin aîné, elle obtient un contrat au prestigieux théâtre du Vaudeville. Barbey d’Aurevilly voit en elle « la grande actrice de l’époque nouvelle » et la compare à Rachel, l’immense comédienne de l’époque romantique. Passant du répertoire populaire aux pièces d’avant-garde, elle fait montre d’un talent multiple qui s’est exprimé, entre autres, dans les rôles d’héroïnes des pièces Germinie Lacerteux des frères Goncourt (1888), La parisienne d'Henry Becque (1893), Une maison de poupée d'Ibsen (1894).
Mais c'est le rôle-titre de Madame Sans-Géne, pièce de Victorien Sardou créée au théâtre du Vaudeville en 1893, qui lui apporte véritablement la célébrité. Sa tournée en Amérique en 1895 dans ce rôle lui confère une notoriété internationale. New York lui fait un triomphe. Elle incarnera encore ce personnage pétillant dans deux versions cinématographiques de Madame Sans-Gêne en 1900 et en 1911.
Partout où elle joue, elle fait salle comble : aux Etats-Unis, en Angleterre, à Berlin, à Vienne. En1899, elle effectue une tournée d’hiver en Italie, en Espagne et au Portugal. Elle quitte Lisbonne après un succès énorme, comblée d’égards et de cadeaux par le roi et la reine de Portugal.
En 1906 Réjane rachète le Nouveau-Théâtre d’Aurélien Lugné-Poë, qu’elle rebaptise Théâtre Réjane et qu’elle dirige jusqu’en 1918. Elle y donne, en 1911, la première française de L’Oiseau bleu de Maurice Maeterlinck. Racheté en 1918 par Léon Volterra, le Théâtre Réjane devient le Théâtre de Paris. |
Réjane était l’arrière-grand-mère du photographe Jean-Marie Périer et de l’acteur de cinéma Marc Porel (1949-1983) qui apparaît, notamment, dans Ludwig ou le crépuscule des dieux (1972) et dans L'innocent (1976), deux chefs d'oeuvre de Luchino Visconti.
La maison Bail était réputée pour l’excellence de ses fabrications. C. Duhamel écrit dans Le Figaro illustré du mois de mai 1893 : « le seul luxe que pourront se permettre les jeunes, c’est le buggy, correctement attelé par Gabriel Clément [sellier réputé], que construisent si bien les frères Bail, et que vous voyez crânement conduit par la petite femme dessinée par Vallet ».
Dame conduisant un Buggy construit par les frères Bail, harnais de Gabriel Clément. Dessin de Louis Vallet (Le Figaro Illustré, mai 1893)
La raison sociale Bail aîné apparaît en 1860. Bail aîné fabrique « toutes espèces de voitures de luxe et de fantaisie pour la France et l'étranger » (Almanach du commerce de Paris...). On trouve dans ses magasins un grand choix de voitures à huit ressorts. Ainsi, en 1867 Bail aîné réalise une calèche à la d' Aumont à huit ressorts pour le Khédive d'Egypte Ismael Pacha et une calèche à huit ressorts et à siège de cocher à housse pour l'ambassade de Turquie.
Daumont du Khédive d’Egypte Ismaïl Pacha, par Bail. Harnais de Clément père. 1867 (Le Figaro Illustré, mai 1893)
Voiture de l’ambassade de Turquie, par Bail. Harnais de Clément père. 1867 (Le Figaro Illustré, mai 1893)
Il fournit à partir de 1870 les Grands Magasins du Louvre en voitures de commerce. En 1880, il présente dans ses magasins un « choix considérable de voitures d'été » . La maison est par ailleurs réputée pour ses omnibus.
Omnibus à 6 places d’intérieur, par Bail aîné, à l’Exposition universelle de Paris en 1889 (Charles Gourdin, Album des principales voitures exposées en 1889)
Omnibus pour service de courses, excursions, etc. par Bail aîné, à 12 places d’intérieur et 12 d’impériale ; caisse jaune de chrome, train noir et jaune, garniture en drap gris, poids 2550 kilos (La Carrosserie Française, 15 mars 1891)
Bail aîné est nommé membre du conseil de la chambre syndicale des carrossiers pour 1890 et 1891 ; il est réélu en 1894, 1906 et 1907.
A l’Exposition Universelle de Paris en 1900 il présente quatre voitures dont un carrick à pompe à caisse et train verts, réchampi noir avec deux filets blancs sur les moyeux, garniture en drap gris noisette, un coupé avec « électricité partout : au milieu du pavillon, aux lanternes et au cadran indicateur, placé en avant sur la coquille, et commandé de l’intérieur, roues caoutchoutées, caisse et train noirs, filets rouges à la caisse, deux baguettes rouge cerise sur moyeux seulement », et… une automobile !
Carrick à pompe, par Bail aîné, à l’Exposition universelle en 1900 (Ch. Gourdin, Album des principales voitures figurant à l’Exposition Universelle de Paris 1900)
Par suite de cessation de commerce la maison Bail Aîné fait une vente générale de toutes ses voitures le 11 décembre 1906.
La première voiture construite en 1901 par Bail aîné pour Réjane est un Cab à quatre roues. Cependant, La Carrosserie Française l’appelle simplement Cab, bien que ce terme désigne une voiture à deux roues. Le Cab ou Hansom Cab, d’origine anglaise, est une curieuse voiture à caisse fermée, montée sur deux grandes roues et menée par un cocher haut perché, en périlleux équilibre sur un siège minuscule placé tout à l’arrière de la caisse. Elle inspira une étrange création, le milord fermé, appelé aussi cab à quatre roues, ou cab à la française, voiture hybride résultant de l’amalgame entre un milord et un cab anglais. L’opération consiste à greffer sur un milord un habitacle de cab, à panneaux de custodes et toit rigides, enfermant complètement le siège des passagers.
Le Guide du carrossier d’août 1903 précise que « le nom de cab à quatre roues a été étendu à ces voitures de la forme qu’ont les milords dont la capote est remplacée par des custodes fixes et dont l’avant est muni d’une porte », mais avoue ignorer l’origine de cette voiture, et cite comme référence la plus ancienne, un dessin du carrossier parisien Baslez, publié en 1839. Ce dessin, premier exemple connu d’une caisse de cab anglais montée sur quatre roues, laisse supposer une origine française à cette invention, ce que semble confirmer l’appellation cab à la française.
On lui prêta d’abord toutes les qualités : plus facile à mener qu’un Hansom cab, plus fraîche l’été qu’un coupé, mieux protégée de la pluie qu’un milord. Malgré ses avantages comme voiture utilisable en toutes saisons, et « en dépit des efforts de quelques constructeurs, le milord fermé n’a jamais obtenu, en France, la faveur du public » (Le Guide du carrossier, 15 octobre 1900). « Comme voiture de luxe on ne le voit que dans un petit nombre de remises ». Sans doute le public parisien la bouda-t-il à cause de son aspect peu esthétique et de son peu commode accès, deux défauts reprochés par l’humoriste Crafty « au carrossier qui a eu le premier l’idée d’emprisonner sous châssis d’innocents voyageurs dans l’épouvantable voiture désignée sous le nom de cab français » (Paris à cheval, 1889).
Le réputé carrossier parisien Georges Kellner qui en revendiquait abusivement l’invention, en avait fait sa spécialité. En 1900, à l’Exposition universelle de Paris, la maison Kellner et Fils présentait encore un milord fermé, unique exemplaire de ce type de voiture figurant à l’Exposition. Le Guide du carrossier observait à son sujet : « seule la maison Kellner qui, depuis longtemps, étudie le cab à quatre roues et s’est fait une réputation pour sa construction, pouvait en exposer un spécimen avec quelque chance de n’avoir pas à le conserver en magasin après l’Exposition ».
Cab à quatre roues présenté par la maison Kellner à l’Exposition Universelle de Paris 1900 (Le Guide du Carrossier, 15 octobre 1900)
La Carrosserie Française, publication spécialisée rivale du Guide du Carrossier, considère le Cab à quatre roues de Madame Réjane comme « une des nouveautés à sensation de la saison » et le décrit avec précision : « Caisse brun tabac foncé, filets jaune d’or, train noir d’ivoire, réchampi de deux filets jaune d’or aux moyeux et aux flammes seulement ». Les châssis de glace sont gainés de drap marron. L’intérieur est tendu de drap gris clair, ainsi que le coussin de guides à l’anglaise. Les lanternes sont de forme fantaisiste dite « cabochon ». Le plaqué est argenté. Les roues ont des bandages en caoutchouc plein assurant un meilleur confort et un roulement silencieux.
On accède à l’intérieur par deux demi-portières verticales surmontées par un « vasistas », vitrage mobile « en deux parties articulées, celle du bas se repliant sur celle du haut, le tout étant maintenu relevé sous le pavillon à l’aide d’une espagnolette à cran d’arrêt de chaque côté ».
Cab construit dans les ateliers de Mr Bail aîné pour Mme Réjane. Dessin de Louis Lagard (La Carrosserie Française, 15 septembre 1901)
L’élégance et l’originalité de cette voiture sont dues à une combinaison subtile de lignes courbes : impériale cintrée, panneaux de brisement et grand panneau de derrière arrondis, profil des panneaux de custodes légèrement concave sur le devant, « lunettes rondes » des panneaux de custode. Cette inhabituelle forme d’ouvertures est très rare. Sur 67 Cabs actuellement recensés quatre seulement ont des ouvertures circulaires : trois exemplaires de Nichols & Company à New York dans les collections Aranda (Espagne), Gloria Austin (U.S.A.) et dans l’ancienne collection Coson (U.S.A.) ; un très élégant exemplaire avec ouvertures ovales, de Reinbolt & Christé& à Bâle, au Musée Suisse des Transports à Lucerne. Quant aux cabs à quatre roues comparables à celui de Réjane, c’est-à-dire avec lunettes rondes, on ne peut citer qu’un exemplaire construit à Londres par Windover, conservé à Vérone dans la collection Carrozze d’epoca della Fiera di cavalli.
Un attelage excentrique
Cette voiture, si originale fut-elle, serait sans doute passée inaperçue si elle n’avait été tirée par un attelage inhabituel à Paris : un attelage de mules. « Cette jolie voiture, faite pour notre grande actrice parisienne Madame Réjane, est toujours attelée de deux mules ravissantes qui lui ont été données par S. M. le roi de Portugal ; le bon goût et l’originalité de cet équipage ont réuni tous les suffrages et ce n’est que justice » (La Carrosserie Française, 15 septembre 1901).
Le chroniqueur mondain Gabriel-Louis Pringué dans son livre 30 ans de dîners en ville, donne une autre version sur la provenance de cet attelage : « Je déjeunais de temps à autre chez Mme Stern avec Mme Réjane [...] qui arrivait rue du Faubourg-Saint-Honoré dans un équipage particulier : une voiture affectant la forme d'un cab anglais, mais à quatre roues, traînée par des mules harnachées de grelots et de pompons, cadeau du roi d'Espagne, Alphonse XIII, qui admirait la conversation de la célèbre artiste ».
Dans son livre de souvenirs, Monsieur Proust, Céleste Albaret rapporte des propos de l'écrivain, ami de la grande comédienne qui l’hébergea un temps, évoquant aussi cette provenance espagnole : « Au cours d’un passage en Espagne, elle fit un tel triomphe que le roi lui envoya en cadeau un carrosse avec des mules, et à son retour à Paris je l’ai vue remonter les Champs-Elysées dans cet attelage. C’était magnifique ! ».
Roi du Portugal ? Roi d’Espagne ? A la vérité, ce qui importe c’est l’hommage ainsi rendu par des têtes couronnées au talent et à l’art, peut être aussi au charme et à la beauté...
Cet insolite attelage de mules, qui aurait été banal à Madrid ou à Séville, ne pouvait qu’être très remarqué à Paris, au point d’être immortalisé par certains artistes. L’illustrateur et caricaturiste, Sem [Georges Goursat, 1863-1934] grand témoin de la vie mondaine parisienne au début du XXe siècle, l’a croqué dans son Album “Les Acacias” (1904), suite de lithographies en couleurs qui, mises bout à bout, forment un panorama de 6 mètres de longs représentant un défilé de cavaliers et de voitures, allée des Acacias dans le Bois de Boulogne, haut-lieu des élégances équestres parisiennes. Dans Les feux de Paris, poème chanté plus tard par Jean Ferrat, Aragon plein de la nostalgie d’une époque heureuse, hélas enfuie, interroge tristement : « Où sont les mules de Réjane ? ».
Ainsi célébrées, les mules de Réjane entrent dans l’univers merveilleux des artistes et des poètes. Merveilleux auquel fait référence Jean-Marie Périer, arrière-petit-fils de la comédienne : « Réjane faisait mettre sur le harnais de ses deux mules des bouquets de violettes à la hauteur de l’oreille. Aussi, lorsque, passant devant l’Elysées, elle croisait la voiture du président Emile Loubet, celui-ci ne manquait jamais de lever son chapeau pour la saluer au passage. Il arrivait qu’elle ne fût même pas dedans, c’est donc amusant de penser que le Président saluait parfois des mules » (Mon arrière-grand-mère Réjane, la plus grande comédienne de son temps, Le blog de Jean-Marie Périer, 11/03/1914).
Sur une photographie prise en 1903 on peut admirer ces jolies mules, habillées de harnais fins, à bricoles et grelotières, sabots vernis, oreilles dressées à l’écoute du cocher, qui se tiennent sagement immobiles tandis que leur célèbre maîtresse, au retour d’une longue séance d’essayage chez le couturier Jacques Doucet, descend de son cab en s’appuyant sur le bras de son jeune fils.
Deux autres photographies les montrent, cette fois, en mouvement enlevant d’un pas énergique le cab de l’actrice, et en promenade au Bois. Elles sont toujours en harnais à bricole et à grelotières.
Un char-à-bancs de promenade pour enfants
La deuxième voiture construite par la Maison Bail aîné pour Réjane est un Char-à-bancs, voiture de promenade, découverte, possédant plusieurs sièges placés transversalement les uns derrière les autres. « Comme pour le Cab, M. Bail aîné a voulu faire une voiture nouvelle et légère, puisqu’elle devait être attelée de deux chevaux de 1,50 m ou de deux mules de même taille, comme celles du Cab, et répondant au programme suivant : premièrement, voiture de plage et de campagne ; deuxièmement, disposition des sièges soulignant bien l’ordre des occupants, premier siège le cocher, puis les enfants, la maman (sic) ». Formulation inattendue. Imagine-t-on l’une des reines internationales du théâtre en mère de famille promenant sa progéniture en voiture ? En 1901, Réjane et son mari Paul Porel, comédien et directeur du théâtre de l'Odéon qu’elle a épousé en 1893, ont deux jeunes enfants, Jacques, alors âgé de huit ans et sa sœur cadette, Germaine. Cette voiture a donc été construite pour promener ces enfants à la campagne ou à la plage en compagnie et sous la surveillance de leur « maman ». Programme « parfaitement résolu » de l’avis du rédacteur de La Carrosserie Française. Où cette « voiture de plage » a-t-elle été utilisée ? Peut-être à Saint-Palais-sur-Mer, station huppée des proches environs de Royan, où Réjane a séjourné.
Char-à-bancs construit par la Maison Bail aîné pour Mme Réjane. Dessin de Louis Lagard (La Carrosserie Française, 15 septembre 1901)
Les éléments esthétiques ou décoratifs de la voiture sont tout aussi importants, sinon plus, que les particularités techniques décrites ci-dessus. « La voiture est entièrement en bois verni, sauf le train qui est vermillon pâle, avec bandes blanches sur moyeux seulement ». Le reste de la peinture, hautement fantaisiste, exprime à coup sûr les goûts non conventionnels de la femme de théâtre à qui la voiture est destinée : « Toutes les ferrures sans exception sont peintes en ocre jaune y compris les lanternes et les ressorts ». Cette violation des règles admises alors, impliquant l’emploi du noir pour tous ces éléments métalliques, loin d’étonner le rédacteur, sans doute sous le charme de la séduisante actrice, semble au contraire l’enchanter à en croire son commentaire béat sur cette couleur ocre jaune qu’il qualifie « du plus printanier et du plus gracieux effet ».
Le deuxième et le troisième siège, réservés aux enfants et à la mère de famille, ont un décor de demi-balustres en applique sur les panneaux. « Les balustres du siège à capote sont plus gros que ceux du siège du milieu, ce dernier ayant une importance moindre, détail qui marque bien la minutie apportée à l’exécution de cette voiture ». L’emploi de différentes essences de bois, produisant un effet de polychromie subtile, ajoute à cette minutie : « Les deux sièges à balustres sont en acajou, balustres en noyer, le tandem du siège de cocher est en noyer ; le grand panneau ou coffre de derrière est en noyer clair, le panneau du coffre de devant en noyer foncé ; les deux médaillons ronds bombés, rapportés en saillie de chaque côté sont en noyer foncé bien veiné. Le garde-crotte est en noyer ». Le plaqué de la voiture est argenté.
Le dernier siège, pour la « maman », est abrité par une capote « en toile à voiles » avec une gouttière en noyer. La garniture est « entièrement capitonnée en vache vernie grainée, couleur crème, pour les sièges à balustres. Pentes tendues pour le siège de cocher et celui à capote […] pas de pente au siège basculant […] coussin de guides à l’anglaise entièrement tendu avec côtés en vache vernie et dessus en drap ». Ultime raffinement « la galerie du siège du cocher est déportée en arrière pour former poignée ou main courante ». Le carrossier, on le voit, a veillé au moindre détail.
Malgré son mauvais état de conservation, on reconnait sur une photographie prise en septembre 1907, le char-à-bancs de Réjane avec ses trois sièges, sa capote en toile claire sur le dernier siège, attelé à deux mules, les fameuses mules ibériques sans aucun doute, avec leurs harnais à bricole, sans reculement, comme toujours, ou presque à cette époque, des brides à fortes œillères carrées et des grelotières aux sous-gorges égayant la simplicité de ce harnachement.
Les équipages de Réjane démontrent, en 1901, le goût encore très vif pour les belles voitures hippomobiles et les beaux attelages au moment même où l’automobile les menace de disparition.
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