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Par figoli
Cet article donne la parole à un cheval de trait qui nous raconte sa vie en cette année 1890.
Il vous sera présenté en plusieurs parties dont voici la première.
La Dure journée du matricule 118068 cheval d’Omnibus.
Brrrr…rrr. déjà 4 heures. Bonjour, je suis le matricule 118068 ,un des 14000 chevaux de la Compagnie Générale des Omnibus en cette année 1890. Avant, quand je labourais le sol de mon perche natal, mon petit nom c’était Paulo. Allez, pas de nostalgie car ici c’est service service . Déjà sous les ordres du piqueur, les palefreniers s’activent autour de nous. C’est l’heure de ma première ration et le grand gaillard de 1m65 que je suis a très faim. Alors je vous laisse visiter mon écurie située au premier étage d’un des nombreux dépôts de la CGO. Vous pouvez admirer cette organisation avec des wagonnets montés sur rail pour transporter foin paille et fumiers, et ces machines qui préparent, stockent, trient, et mélangent notre grain.
Maintenant c’est la toilette .Après m’avoir fait la crinière et la queue, les palefreniers me passent à la brosseuse mécanique (aie ! efficace mais pas tendre) et je serai propre comme un sou neuf pour la visite du vétérinaire et du Maréchal qui viennent chaque matin vérifier notre aptitude au service.
Mais il est déjà 6 heures, cochers et contrôleurs viennent prendre leur service pour une journée de 12h. Le relayeur m’a déjà harnaché et m’amène à l’Omnibus. « Omnibus » Quel drôle de nom ! Il parait que la première liaison urbaine régulière à Nantes prenait son départ devant un chapelier nommé OMNES dont l’ enseigne affichait
« Omnes omnibus » soit «Omnes pour tous » d’ou le nom omnibus donné par les voyageurs.
Construites dans les ateliers de la CGO ces énormes voitures à impériale pouvaient contenir suivant les modèles 26, 30 ou 40 passagers. Elles sont surtout, foi de Paulo, très lourdes faisant souffrir nos jarrets et moi je dirais pour tous peut être… mais Paulo, lui il s’en passerait bien !
Le piqueur accompagné du chef de dépôt passent entre les voitures pour vérifier s’il n’y a pas eu d’erreur commise et si nous sommes bien traités. Hé oui, nous avons beaucoup de valeur et les sanctions pleuvent si les consignes ne sont pas respectées. Tout va bien et notre cocher nous lance un vivace « allez ». Comme nous, des centaines de voitures se dirigent vers les départs des 45 lignes d’omnibus, tandis que d’autres compagnons d’infortune relancent des voitures encore plus lourdes sur les 31 lignes de tramway :
-dans les lieux touristiques
-mais surtout dans tous les points névralgiques de la capitale, comme ici aux halles, où les voitures des transporteurs finissent de décharger leurs marchandises dans le « ventre de Paris »
Nous quittons notre dépôt et nous engageons dans des rues spacieuses et larges de 15 mètres en moyenne. (Fin 19°, 24000 immeubles furent détruits et 165 km de nouvelles voies furent percées). Nous arrivons sur une portion de pavés en bois moins bruyants mais glissants (25% des rues étaient pavées de bois, jointés au goudron et régulièrement gravillonnés) . Dans la grande descente, malgré les freins puissants, le dos peine. Et toujours ces arrêts qui, s’ils nous permettent un peu de respirer, nous obligent à un énorme effort pour relancer le mouvement du « monstre ». Nous reprenons notre route à une vitesse de 8 Km à l’heure (arrêts voyageurs compris) et arrivons devant la grande côte. Heureusement le côtier nous attend avec les chevaux de renfort.
Et voilà, nous sommes enfin à notre tête de ligne « La Bourse », l’autre « ventre » économique de Paris où nous nous reposons quelques instants.
« Allez » et c’est reparti dans l’autre sens. Les rues se remplissent et il devient difficile de tenir la cadence
Nous sommes enfin de retour à l’écurie, il est 10 heures. J’ai effectué mes 18 kilomètres journaliers. Aidé du cocher, le relayeur nous dételle et le laveur s’empare des harnais pour les nettoyer. Déjà d’autres copains sont attelés et prennent leur place dans la file .
Un palefrenier me prend en charge pour me bouchonner, me faire boire, et me conduire à l’écurie. La journée continue au rythme de mon alimentation alternant eau, foin ou paille, grain. Vers 23 –24 heures, les derniers rentrent et on peut enfin se reposer.
Et demain ça recommence ! Ha non c’est vrai, pas pour moi. Hé oui, j’ai douze ans et cela fait 8 ans que j’effectue le service (A cette époque pour ce dur labeur la moyenne de résistance des chevaux était d’un peu plus de 5 ans de service). Ils vont me réformer comme ils disent. J’espère que je ne finirai pas comme la majorité des copains à la boucherie hippophagique ?
Non Paulo, les chevaux en bon état comme toi étaient rachetés pour d’autres tâches, et si nos lecteurs ont été intéressés par cet article, nous raconterons plus tard ta nouvelle vie dans les rues de Paris.
Pour en savoir plus, voici quelques ouvrages de références de cet article :
Histoire statuts et administration de la voirie urbaine (A.Guillermes,S Barles )Le temps des révolutions (amis d’hérodote)Le cheval à Paris de1850 à 1914 (G Bouchet)Le cheval dans la vie quotidienne (B Lizet)Le cheval à Paris (ouvrage collectif ville de Paris),….
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