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La sellerie "Alp. Camille jeune"
La maison "Alp. Camille jeune" est considérée, à la fin du XIX°, comme tenant la première place de l'industrie de la sellerie, réputation qui perdurera jusqu'au début du XX° siècle.
A l'origine, cette maison parisienne fut créée, en 1826, par M. Essminger, puis reprise, en 1856, par Monsieur Trousselle qui s'associat, en 1871, avec Alphonse Camille.
La maison devint alors "Trousselle § Camille jeune".
C'est en 1881, lorsque Alphonse Camille resta seul aux commandes de l'entreprise, que celle-ci commença son ascension jusqu'à devenir une des premières concurrentes de la renommée industrie anglaise. Elle la supplanta même dans de nombreux pays. Dès 1892, elle était un leader en France et distribuait ses fabrications dans de nombreux pays d'Europe ainsi qu'en Amérique du Sud, l'Amérique Centrale, les Antilles, l'Orient ou l'Extrème Orient,...
Cliquer sur les vignettes pour les agrandir.
Harnais en paire, selle de voyage, selle orientale, selle de gala réalisés en 1892 par "Camille jeune"
Il est à noter que "Alp Camille Jeune" commença son activité dans une période très propice. En effet, la guerre de 1870 fut un échec cuisant pour l'armée française, ce qui entraîna son affaiblissement et sa désorganisation.
Dès la fin de la guerre, l'esprit de revanche fut trés vif et la troisième République se fit un devoir de réorganiser et de rééquiper l'armée. Le cheval était à l'époque un élément clef de la puissance militaire dans la cavalerie et l'artillerie mais aussi dans l'intendance. Ce marché de la sellerie militaire donna un coup de fouet à la maison "Alp Camille jeune". L'entreprise fournit plus de 40000 harnachements complets au gouvernement français. Ces commandes lui permirent d'accéder aux marchés militaires de nombreux gouvernements étrangers.
Nous vous présentons maintenant quelques exemplaires de ces harnachements miltaires, en commençant par un produit phare de la maison; le bât pour mulets.
Bien que présentant les mêmes caractéristiques de base, priviliégiant le confort de l'animal, la facilité de chargement et la solidité, chaque bât était spécifique à une ou plusieurs utilisations.
Le bât ne servait pas seulement au transport des fournitures, hommes ou blessés, mais aussi au transport des armes et de leurs munitions. Certains modèles pouvaient également s'adapter à la traction.
En ces périodes de colonisation, "Alp Camille Jeune" fabriqua aussi des bâts correspondant à des animaux plus exotiques comme ces harnachements pour dromadaires.
Elle fournit également plusieurs harnais adaptés aux différents modes d'attelage, utilisés dans les armées; de l'artillerie à la voiture d'ambulance.
Harnais de voiture en flèche et en poste pour voiture de transport et d'ambulance.
Harnais d'artillerie
Les harnachements de cavalerie sont également une force de la maison.
Selles de cavalerie
La capacité de fabriquer en masse est assurée, en 1892, par une équipe de 150 ouvriers dont 30 femmes. La maison est remarquée pour la solidité, la qualité et la trés grande variété de ses productions.
Pour ses réalisations civiles et miltaires, "Alp. Camille jeune" fut d'ailleurs médaillée à de multiples occasions et Alp. Camille a été invité comme Jury à de nombreux concours.
1883, Amsterdam, médaille d'or;
1884, Nice, membre du jury, hors concours ;
1887, Hanoï, médaille d'or;
1887, le Havre, membre du jury, hors concours;
1888, Barcelone, membre du Jury, hors concours
1889, Paris, membre du jury, hors concours
1889, Paris (exposition collective militaire),
médaille d'or;
1890, Londres, membre du jury, hors concours;
1891, Moscou, vice-président de la cI. XXV.
1893, Batavia, médaille d'or
1893, Chicago, concours cheval de la légion d'honneur
1895, Amsterdam, diplome d'honneur
1900, Paris, 2 grands prix, 2 médailles d'or.
1902, Hanoi, grand prix.
Sur cette période, les salariés de l'entreprise ont reçu 6 médailles d'or, 7 médailles d'argent et 9 médailles de bronze.
Ce qui a surtout contribué à faire connaître cette maison en France et à l'étranger, c'est la réalisation d'un riche album colorié, diffusé dans toutes les parties du monde, et contenant pas moins de 120 planches. "Alp, Camille Jeune" y fait figurer: des articles d' équipements militaires de toutes sortes, différents types de harnais (- de luxe, de travail avec leurs pièces détachées), ainsi qu'un trés large panel de selles et autres produits de sellerie. Il est difficile de dater ces catalogues car il étaient constitués d'une jaquette comprenant des planches numérotées. La maison enlevait, rajoutait ou modifiait ces planches suivant les spécificités de production de l'année en cours. Seul, le livret de tarification annuel permet donc de dater ces catalogues en nous indiquant seulement que les éléments présentés étaient encore en vente à l'année du livret. Cela nous donne par contre aucune information sur la date de création du harnachement.
Cette pratique perdura lorsque, dans les années 1900, Alp. Camille s'associa avec son fils; la maison devint "Alp Camille § Fils". Voici quelques-unes de leurs réalisations civiles, extraites de ce catalogue.
Les commentaires ont été, quant à eux, retrouvés dans une tarification de 1898, malheureusement incomplète, de "Alp Camille jeune".
Harnais pour voitures de travail et de service
"Harnais de voiture de place: garniture nickel ruban, boucles simples, collier verni ouvert du bas, attelles tirage à violon et à olives, traits avec mains d'olive, boucleteaux dans le bas de boucles jonc vernis, sellette 1/2 vernis, à mancelle, avec porte brancard fer verni, panneaux treillis noir, reculement et barre à fourche, le tout en cuir simple monté à fourreaux,mors allemand étamé, crochet de rènes"
Nous avons largement présenté ce harnais à colliers métalliques, utilisé par la Compagnie générale des omnibus, dans l'article:
Harnais de poste
"Paire harnais de poste: cuir noir à la Daumont, bricoles avec tabliers, trait corde enveloppé cuir, selle de poste avec étrivières et étriers, bride avec oeillères vernies, fronteaux à clous et à blaireau, grelottières queue de renard, mors omnibus polis, garniture cuivre nickel"
"Paire de harnais de poste: cuir fauve, bricoles à tabliers, mantelets de poste, traits cordes, grelottières, queues de renard, mors allemands,embouchures fixes étamées, garniture cuivre nickel."
Harnais spécifiques à des types de voitures.
"Harnais cabriolet: cuir simple monté à foureaux, collier verni, attelles ordinaires, traits rivés, 18 lignes avec boucleteaux dans le bas, sellette 1/2 vernie, panneau serge, reculement à barre à fourche, oeillères vernies, panurges à la sous-gorge, frontal verni"
"Paire harnais d'Omnibus: garniture jonc vernie, colliers à système, traits à crochets dans le haut et chaines dans le bas, reculement barres croisées, surdos de milieu, longues croupières bouclant aux colliers, guides simples, brides sans oeillères, mors omnibus étamés."
"Harnais de tapissière; doublé, bombé à fourreaux, collier verni, attelles tirages à violon et à olives, sellette vernie à coulisse, panneau serge, reculement à la fermière, guides simples, bride à oeillères vernies, panurges au dessus de la tête; frontal à lame, cocardes pleines sans mors, grelottières à blaireau"
Harnais de luxe:
Harnais à bricole
"Harnais cabriolet, cuir jaune à bricole, barre doublée, le reste cuir simple, le tout monté à foureaux, sellette d'une pièce panneau serge; bride avec panurges à la sous-gorge, frontal à un jonc, cocardes pleines.Garniture jonc, bouclerie à talon."
"Paire harnais cuir noir à bricoles: mantelets vernis à troussequins, panneaux serges, traits à crosse fixes, reculement barres à fourches, le tout doublé plat, monté à passants, brides avec panurges au dessus de tête, fronteaux vernis, cocardes pleines."
SU
Harnais paire pour 2 roues
La maison "Alp.Camille jeune" (plus tard Alp. Camille § Fils" fournissait donc des équipages complets mais vendait également au professionnels de la sellerie toutes les pièces nécessaires à la réalisation de leurs propres harnachements; colliers, passants, bouclerie, arçons...
Nous terminons cette présentation par quelques modèles de selles.
Un des facteurs de la puissance industrielle de "Alp.Camille jeune" (et plus tard de Alp. Camille§Fils) fut la propriété de nombreux brevets qu'elle avait déposés ou dont elle avait acquis l'exclusivité comme, dans les années 1890, le brevet d'origine autrichienne de la selle, réputée incassable; "Gelle Keen".
"Il serait trop long de vous dire tout le bien que je pense de la selle Gelle Keen. Voici ce qui résume ma pensée: toutes les qualités sans défauts"
- James Phillips, maître de haute école-
Dans les années 1900, la société "Alp Camille § Fils" obtiendra, quant à elle, le monopole de la vente des selles Ellimac.
Comme nous l'avons vu, la sellerie militaire a été un des facteurs du développement de l'activité de cette grande maison mais elle le fut également pour de nombreux autres selliers. En 1918, il restait encore sur Paris une trentaine de maisons capables de répondre aux besoins qualitatifs et quantitatifs des armées. La maison Camille, en tant que telle, n'apparaît plus sur les listings. Il reste, certes, une société "Combes- Camille", impasse Jean Bausire, dont je n'ai trouvé pour l'instant aucun lien avec la maison "Alp. Camille § Fils".
Texte:
Patrick Magnaudeix
(Figoli)
Documentation:
"Une grande maison de sellerie parisienne". Panthéon de l'industrie de Juin 1892
Catalogue "Alp. Camille et fils"
Catalogue "Alp. Camille Jeune"
Tarif des salaires "Syndicat général de la sellerie"
Collections Fabre et Magnaudeix
D
Informations supplémentaires.
Nous complétons cet article par quelques informations sur les conditions de travail des salariés de ces selleries de type industriel.
En effet, la production de masse de ces entreprises, travaillant pour les armées, nécessitait une organisation particulière et un personnel hautement qualifié, aux compétences diversifiées; coupeurs, apprêteurs, confectionneurs, selliers, mécaniciens, maillocheurs, ...
Le barème de paiement, établi par le Syndicat général de sellerie de 1918, nous donne quelques informations sur les modalités de paiement des salariés.
Bien que tardif, ce barème met en évidence deux types de paiement:
- à l'heure
On note la large différence de salaire entre hommes et femme puisque, en moyenne, les femmes gagnaient 25% de moins que les hommes.
4
- à la tâche
Les travaux liés à chaque tâche étaient trés précisément déterminés.
Un dernier détail:
Dans les années 1890-1900, quelques soient les types de paiement, les journées de travail allaient de10 à 12 heures de travail. Dans les années 1850, donc à l'époque où l'entreprise était gérée par M Trousselle, les journées avaient une amplitude de15h avec une pose repas, ce qui correspond à 13-14heures travaillées..
Voici, en exemple, le livre du personnel, datant de 1848, du sellier carrossier Ronzier de Bourges. Ce document souligne l'application généralisée de ces amplitudes horaires au secteur de la sellerie et de la carrosserie en spécifiant que les journées de travail commençaient à 5h et se terminaient à 20h.