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Vous trouverez une présentation très accessible des articles en allant dans la catégorie "THEMES FAVORIS". Vous y trouverez: carnet adresse, bibliothèque, vidéos,... auteurs et un classement spécifique à chaque catégorie.

Objets de sellerie du Château d’Espeyran classés Monuments Historiques Jean-Louis Libourel

Objets de sellerie du Château d’Espeyran
classés Monuments Historiques

 

 

Jean-Louis Libourel

 

 

 

 

 

Le château d’Espeyran à Saint-Gilles-du-Gard, propriété des Sabatier, riche famille montpelliéraine, a été dans la deuxième moitié du XIXe siècle un lieu dédié aux plaisirs de la chasse et aux sports de plein air où le cheval tenait la première place. Ecurie, sellerie, remise, à Espeyran tout témoigne du goût passionné des maîtres de maison pour ce bel animal et tout ce qui se rapporte à son utilisation.

 

Dans le cadre d’une campagne de protection au titre des Monuments Historiques du mobilier et des objets d’art du château d’Espeyran, les voitures hippomobiles conservées sur place ont été classées en 2010. (voir article précédent : Les Voitures du château d’Espeyran classées Monuments Historiques).

Dans un même souci de protection d’objets relevant du patrimoine équestre, une dizaine d’éléments conservés dans la sellerie d’Espeyran, sélectionnés pour leur qualité, leur intérêt historique ou leur rareté, ont également été classés.

 

La sellerie du château d’Espeyran (photo Patrick Magnaudeix)

La sellerie du château d’Espeyran (photo Patrick Magnaudeix)

 

La sellerie d’Espeyan est très représentative des selleries que possédait tout château ou grand domaine au XIXe siècle. Comme beaucoup d’autres, elle est entièrement lambrissée. Disposés tout autour, des patères et des porte-harnais supportent des brides élégantes et raffinées pour chevaux de sang, des brides d’officier, des selles de cavaliers et d’amazones, des harnais armoriés à colliers anglais pour attelage à un, deux ou quatre chevaux.

 

Harnais de poste à grandes guides pour quatre chevaux.

Harnais de poste à grandes guides pour quatre chevaux.

 

 Parmi ces derniers, un harnais de poste pour attelage à quatre, complet, avec licols et grelottières, identique au modèle publié en 1878 par le sellier parisien Léné dans “ La sellerie Française et étrangère ”, somptueux catalogue illustré de planches magistralement lithographiées par Albert Adam (1833-1900). 

 

Harnais de poste à grandes guides. Léné : La sellerie Française et étrangère,  1878, planche XXX.

Harnais de poste à grandes guides. Léné : La sellerie Française et étrangère, 1878, planche XXX.

 

Une vitrine murale abrite un bel ensemble d’aciers : mors et filets pour l’équitation ou l’attelage, étriers, éperons, trompes de timon et paires de chaînettes en acier pour voitures de maître.

 

Vitrine aux aciers, vue partielle.

Vitrine aux aciers, vue partielle.

 

Deux porte-fouets, dont un monumental en buis tourné, présentent des cravaches et des fouets d’attelage au milieu desquels se distingue un délicat fouet de dame au manche agrémenté d’une minuscule ombrelle en taffetas de soie couleur noisette.

 

Porte-fouets

Porte-fouets

Fouet-ombrelle de dame

Fouet-ombrelle de dame

 

Comme les voitures, signées de noms illustres de la carrosserie parisienne de la deuxième moitié du XIXe siècle, Baptiste Thomas, Ehrler, Jacques Rothschild, tous ces objets témoignent du soin que les Sabatier, anciens maîtres des lieux, apportaient au choix de leurs équipages. Luxe et anglomanie obligent, tout vient de Paris et de Londres : selles et harnais de Jones, sellier anglais installé place de la Madeleine à Paris, cœur d’un quartier où fleurissaient les métiers de la haute carrosserie ;

 

Marque du sellier Jones, estampée sur un passant de harnais

Marque du sellier Jones, estampée sur un passant de harnais

 

 aciers signés Heather à Londres ; fouets provenant pour la plupart d’une maison fondée en 1750 à Londres, Swaine & Adeney, selliers, fabricants de fouets, d’ombrelles, de nécessaires pour la chasse, fournisseurs de Sa Majesté la reine Victoria et du prince de Galles.

 

 

Marque Swaine & Adeney, fournisseurs de la reine Victoria et du prince de Galles, gravée sur un manche de fouet.

Marque Swaine & Adeney, fournisseurs de la reine Victoria et du prince de Galles, gravée sur un manche de fouet.

 

Curiosité anatomique dressée au centre de la sellerie : le squelette d’un pur-sang arabe, nommé “Actif ”, ramené d’Egypte par le général Bonaparte, témoigne du goût au XIXe siècle pour les chevaux orientaux et de leur rôle dans l’élevage comme améliorateurs de race. Ce squelette a été récemment l’objet d’une méticuleuse restauration au cours de laquelle ont été remplacés les très nombreux et invisibles fils de métal attachant les os  les uns aux autres.

 

 

Le squelette du pur-sang arabe « Actif », au centre de la sellerie.

Le squelette du pur-sang arabe « Actif », au centre de la sellerie.

 

Sélectionnés pour leur qualité, leur intérêt historique ou leur rareté, voici les objets classés en 2010 :

Les vestiges de l’attelage à la d’Aumont — le plus luxueux et le plus dispendieux des attelages — que Frédéric Sabatier utilisait à Paris pour sa calèche à huit ressorts, sortie des ateliers d’Ehrler, hélas disparue, mais mentionnée en 1864 dans son inventaire après décès :

 

Harnais d’attelage à la d’Aumont. Léné : La sellerie Française et étrangère,  1878, planche XIII.

Harnais d’attelage à la d’Aumont. Léné : La sellerie Française et étrangère, 1878, planche XIII.

 

les deux selles des postillons, taillées dans un très beau cuir fauve, aux pommeaux et aux troussequins garnis d’empiècements en métal argenté, et portant la marque  “ R. Jones & Fils selliers anglais successeurs de Mr Anderson place de la Madeleine n° 13 à Paris  ” ;  

 

Selle de postillon de l’attelage à la d’Aumont.

Selle de postillon de l’attelage à la d’Aumont.

Selle de postillon de l’attelage à la d’Aumont. Etiquette portant la marque “ R. Jones & Fils selliers anglais successeurs de Mr Anderson place de la Madeleine n° 13 à Paris  ”, collée sur les faux-quartiers de la selle.

Selle de postillon de l’attelage à la d’Aumont. Etiquette portant la marque “ R. Jones & Fils selliers anglais successeurs de Mr Anderson place de la Madeleine n° 13 à Paris ”, collée sur les faux-quartiers de la selle.

 

les deux fouets des postillons, signés Swaine & Adeney, à manches courts, gainés de fines lamelles noires de fanon de baleine  tressées, et ornés d’un culot et de viroles en argent ciselé (décor de cartouches et de feuillages), et aux montures de cuir blanc ;

 

Fouets des postillons de d’Aumont, signés Swaine & Adeney à Londres.

Fouets des postillons de d’Aumont, signés Swaine & Adeney à Londres.

 

et, rarissimes, les deux livrées de ces postillons : culottes à pont, à boutons de nacre, en peau naturelle blanche, chemises à col officier en taffetas de soie vert empire, gilets à cols en satin de soie rayé blanc et jaune, casaques en satin de soie rayé blanc et vert, couleurs des Sabatier, garnies sur le devant et aux manches de rangs de petits boutons de passementerie blancs et verts.

 

 

Livrées des postillons de d’Aumont, aux couleurs de la famille Sabatier.

Livrées des postillons de d’Aumont, aux couleurs de la famille Sabatier.

 

Outre ces quelques restes de l’équipage à la d’Aumont, plusieurs aciers ont également été classés :

Un mors du XVIIe siècle, à canon brisé et grandes branches « à la connétable » en forme de S (27 cm de longueur)  avec gourmette à anneaux ovales torsadés et fausse-gourmette faite de maillons très fins en fil de fer.

 

Mors à branches « à la connétable », XVIIe siècle.

Mors à branches « à la connétable », XVIIe siècle.

 

Un mors du XIXe siècle, à branches droites, ornée chacune d’un large motif circulaire enserrant un décor formant remplage.

 

Mors à décor de remplage, XIXe siècle.

Mors à décor de remplage, XIXe siècle.

 

Un très beau mors d’attelage, sans doute anglais, à branches complexes (29,5 cm) décorées de fleurons quadrilobés et de grandes bossettes (7 cm) en forme de cartouches rectangulaires aux angles abattus portant des armoiries sommées d’une couronne comtale.

 

Mors d’attelage à bossettes en forme de cartouches rectangulaires armoiriés.

Mors d’attelage à bossettes en forme de cartouches rectangulaires armoiriés.

Un mors Liverpool, à canon très légèrement cintré dit à pompe, signé “ Germain à Paris ”.

 

Une paire de mors d’attelage, anglais (?), à grandes branches complexes (25 cm), en forme de S, ornées chacune d’un fleuron quadrilobé avec motifs en pointe de diamant.

 

Paire de mors d’attelage, à grandes branches ornées d’un fleuron quadrilobé.

Paire de mors d’attelage, à grandes branches ornées d’un fleuron quadrilobé.

Une paire de très beaux mors d’attelage Buxton à grandes bossettes ovales armoriées (9 cm), dont les deux branches (26 cm) et la barrette courbe qui les réunie dans leur partie inférieure sont forgées d’une seule pièce.

 

Paire de mors d’attelage Buxton à grandes bossettes ovales armoriées.

Paire de mors d’attelage Buxton à grandes bossettes ovales armoriées.

 

Destiné à faire ingérer à un cheval malade des potions médicamenteuses qu’il refuse d’avaler, un mors vétérinaire, robuste, dont la beauté réside dans sa forme simple et dans la qualité de son exécution. Il est composé d’une grosse embouchure cylindrique creuse, percée en son centre d’une petite ouverture circulaire (2 cm de diamètre) pour l’écoulement des potions versées dans la bouche du cheval au moyen d’un étroit entonnoir conique encastré perpendiculairement à une extrémité de l’embouchure.

 

Mors vétérinaire.

Mors vétérinaire.

 

Le classement de ces objets est un véritable évènement, les ouvrages de sellerie et d’éperonnerie, à l’exception des pièces de la sellerie du château de la famille d’Orléans à Randan, étant jusqu’alors quasiment absents du gigantesque corpus des objets classés. Il constitue une avancée importante dans la reconnaissance et la préservation du patrimoine équestre.

 

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J
Ma-gni-fique… un vrai bonheur ! Merci.
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J
Magnifique !!!
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