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Un prince meneur : Louis XIV royal aurige.

 

Avant que ne se répande chez les gentlemen de la haute société du XIXe siècle la pratique élégante et sportive de la conduite en guides, depuis longtemps et bien avant eux quelques grands de ce monde s’étaient adonnés au plaisir de conduire. Louis XIV est le meilleur et le plus ancien exemple de ces princes qui aimaient mener leur attelage.

 

Louis XIV excellait dans les exercices physiques exigeant une parfaite maîtrise de soi. Depuis sa jeunesse, la danse et les arts équestres étaient parmi ses plaisirs préférés. Le Roi Soleil aimait les chevaux. Le galop de ses montures et le trot de ses attelages ont rythmé sa vie entière, à la guerre, à la chasse, à la promenade, en voyage. Les monumentales écuries qu’il fit ériger à Versailles face à son palais sont l’expression grandiose de cette passion des chevaux.

 

« Admirable à cheval », nous dit Saint-Simon (Mémoires), cavalier infatigable — il pouvait galoper des heures entières à la poursuite du gibier — Louis XIV était aussi un habile aurige. Il fut le premier souverain français à mener régulièrement des attelages, et avec brio. Fin connaisseur, c’était un plaisir, selon Pierre-Thomas du Fossé (Mémoires), de le voir « dans la cour du Louvre où il descendait pour assortir des attelages de différents chevaux de carrosse » : des Noirs d’Espagne, des Brandebourg bais, des Gris perle d’Oldenbourg, des Tigrés de Poméranie, des « Feuille morte, d’un poil très rare et très beau », des Hollandais, des Frisons, des Grandes et Petites Pies, des Zélande, des Grands et des Petits Danois « les plus beaux carrossiers », des Petits Normands « ceux qui tiennent le mieux le pavé ».

Un prince meneur : Louis XIV royal aurige.

Des gris perle et des pies. Etude de cinq chevaux, atelier de Van der Meulen, fin du XVIIe siècle (Rouen, Musée des Beaux-Arts)

 

En 1712, il possède « vingt-cinq beaux attelages chacun de dix chevaux » (L’Etat de la France, 1712).

Un prince meneur : Louis XIV royal aurige.

Un grand attelage de gris perle. Adam Frans Van der Meulen (1632-1690), Entrée solennelle de Louis XIV et de la reine Marie-Thérèse dans Arras le 30 juillet 1667, détail (Châteaux de Versailles et de Trianon)

 

 

Bon cavalier, le roi aime aussi conduire. Un jour où il se trouvait à Saint-Germain, il fit monter sa maitresse madame de Montespan dans un carrosse de louage, puis, grimpant sur le siège du cocher, il saisit les guides et exécuta avec assez d’habileté le trajet jusqu’au Palais-Royal, résidence de la reine mère.

 

Depuis qu’il s’était cassé le bras en courant le cerf en 1683, Louis XIV suivait la chasse dans une calèche « tirée par quatre petits chevaux qu’il menait lui-même à toute bride, avec une adresse et une justesse que n’avaient pas les meilleurs cochers, et toujours la même grâce à tout ce qu’il faisait » déclare Saint-Simon, admiratif. L’habileté du roi à diriger ses chevaux en forêt dans l’excitation de la chasse est confirmée dans une lettre du 16 mai 1702 par la Princesse Palatine, femme de Philippe d’Orléans frère du roi, grande chasseresse aux côtés de son royal beau-frère Louis XIV : « Il a une petite calèche et de tout petits chevaux, mais ils courent si bien qu’on suit toujours les chiens et qu’on ne perd presque jamais la chasse, comme si l’on était à cheval ». Un tableau du peintre Jean-Baptiste Martin l’Aîné (Musée national de Fontainebleau) montre le roi menant cette calèche, en bois doré, montée sur un train rouge, attelée à quatre chevaux noirs. 

Un prince meneur : Louis XIV royal aurige.

Louis XIV dans une partie de chasse menant une calèche attelée à quatre chevaux noirs. Détail d’un tableau de Jean-Baptiste Martin l’Aîné (Musée national de Fontainebleau)

 

 

Affaibli par les ans, le vieux monarque a renoncé à mener les fougueux attelages à quatre chevaux de sa petite calèche, mais il conserve le goût de la vitesse jusqu’à la fin de sa vie.

La Princesse Palatine s’émerveille encore de le voir le 9 août 1715, trois semaines avant sa mort, descendre « péniblement de la petite calèche où il conduisait lui-même, malgré ses soixante-treize ans, un cheval rapide pour suivre la chasse ». La Palatine fait erreur sur l’âge du roi : né en 1638, Louis XIV avait en réalité soixante et dix-sept ans en 1715.  

 

Un prince meneur : Louis XIV royal aurige.

 

Dessin préparatoire pour la Prise de Condé-sur-l’Escaut par Louis XIV, le 26 avril 1676. (Paris, Collection Emile Hermès).

 

 

Un prince meneur : Louis XIV royal aurige.

Louis XIV parcourant la campagne au grand galop dans un soufflet, ou chaise à deux roues, qu’il conduit lui-même. Jean-Baptiste Martin l’Aîné, Prise de Condé-sur-l’Escaut par Louis XIV, le 26 avril 1676 (détail), vers 1690.(Châteaux de Versailles et de Trianon).

 

 

Ainsi, le Roi Soleil a été un aurige expérimenté, admiré pour sa dextérité et sa hardiesse aux guides, bien différent de l’image que donnent de lui les nombreux portraits équestres, représentations officielles, où il caracole sur des montures soumises, figées dans des postures conventionnelles propres au genre et à l’époque.

 

 

Jean-Louis Libourel

 

Texte publié dans « Versailles, une passion, Album amicorum présenté à Béatrix Saule », 2017.

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