A la barrière

 A la barrière

                D’un côté, deux juments de vingt ans, belles encore.
Sereines et joyeuses.
C’est un satisfecit, songe-t-elle dans un imperceptible sourire.

De l’autre, la femme de cheval… cassée, hors d’âge, seule
et définitivement à pied.
Si elle a été belle, ça ne se voit plus guère.
Quoique de dos… comme la danse classique, la pratique du dressage
donne une inimitable tenue.
Sur la barrière de ce pré possiblement vide, à présent,
elle prend appui comme sur des béquilles.
Soucieuse.
Quand il ne reste plus que deux chevaux, si l’un s’en va …
hurlant au vent  son désespoir, l’autre ne peut rester.
Un cheval seul, pour elle, cela ne se peut pas.

Le jour est arrivé où il n’est plus possible, en cas de malheur,
d’en accueillir un autre et puis un autre encore.
Avec la fatigue et l’impécuniosité, à pas feutrés, s’est installée la
peur :
- Et le dernier, qui s’en occupera et s’en occupera-t-on bien,
si je ne suis plus là ?
Alors elle croise les doigts :
- Qu’importe le reste, si je le sauve…

Trop d’illusions perdues dans un domaine rejoint pourtant, des rêves à
la main.
Et vrai qu’il n’est jamais de bon augure, quand on n’a d’autre choix
pour exister,
que de les accrocher à l’encolure des chevaux.


Julie Wasselin

Réponse aux commentaires; Arba préfère en fait ces fleurs là;