Coktail en Championnats de France
Un soir doré illumine la somptueuse terrasse du champ
de
courses de Lignières, au royaume des
grands noirs du Berry.
Se presse autour des petits fours l’élite hétérogène de l‘attelage
français, à l’issue des reprises de dressage. Les résultats ont été
annoncés aux concurrents et les protocoles, ensuite, leur ont été
distribués, avec pour consigne de conserver en vie, encore un
moment, suffisamment de juges pour les épreuves de marathon
et de maniabilité.
Á l’écart, une coupe de champagne à la main, vous récupérez de la
tension inhérente à de nombreuses heures de jugement en observant
les visages et les réactions. Dépitées, hargneuses, déçues,
soucieuses, heureuses et discrètes aussi, il est vrai… bruyamment
joyeuses ou faussement modestes et même… un rien méprisantes,
parfois, pour ceux qui se sont plantés ou qui décidément n’ont pas
leur place ici. Bel échantillonnage de la nature humaine aux prises
avec son nombril, aussi détestable en ses extrêmes qu’elle peut être
délicieuse dans sa modération.
Valse-hésitation et sourires enfarinés bourdonnent autour des juges
comme des insectes affamés tandis que s’approche de vous un
concurrent à la triste figure :
- Euh… est-ce que ce serait possible de vous parler ?
- Bien sûr, voyons… c’est l’occasion où jamais.
Il vous met alors l’un de ses protocoles sous le nez, pas content de
ses notes, qui, effectivement, sont mauvaises.
Prenant des gants, vous tentez de lui expliquer que vous ne jugez que
ce que l’on vous montre et que vous avez certainement fait inscrire des commentaires qui justifient ses scores, mais que l’on peut en discuter.
vous remarquez alors, en bas du papier, que ce n’est pas votre
signature et que ce n’est pas vous qui l’avez jugé…
Retenant le fou-rire qui vous gagne, vous vous contentez de déplorer la confusion qui s’ajoute à ses désillusions.
Julie Wasselin