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Omnibus privé 5:
Omnibus-mail
L'omnibus à capucine, dit également omnibus bourgeois, n'est pas le seul modèle destiné à être conduit par son propriétaire. Certains sportmen utilisent un autre modèle d'omnibus. Attelé à quatre chevaux, il est dédié à la pratique du Four in hand aux mêmes fins que les park-drags et road-coachs; promenade mondaine, courses, chasse,... Tout en gardant la structure d'un omnibus, il s'inspire de certaines des caractéristiques des coachs; imposantes dimensions, grand coffre de type mail accolé à la caisse, sièges d’impériale à l'avant et souvent, à l'arrière, coffre à pique-nique; accessoire indispensable à toute sortie raffinée.
De par ces particularités, il est nommé Omnibus-mail ou Coaching-omnibus.
L'omnibus-mail, n'ayant pas les règles de conformité liées aux coachs, autorise aux propriétaires un grand panel de choix de formes et de présentations. La diversité des modèles qui sont actuellement conservés montre que ces propriétaires en ont profité pour marquer leur originalité. Les trois voitures Vandenplas, présentées dans cet article, en sont un parfait exemple.
Cet omnibus, plus maniable qu'un coach, autorise son utilisation pour le service d'autres tâches attribuées aux voitures de maître.
Correspondant à une clientèle de sportmen qui privilégient dans leurs choix, certes, la qualité de la voiture mais surtout la notoriété du carrossier, la construction de ce type d'omnibus ne se diffusa que très peu en dehors du monde relativement fermé de la carrosserie de luxe.
De fait, cette voiture d'exception est peu représentée dans les revues professionnelles proposant dessin et plans de voitures à la mode; "Carrosserie française", "Guide du carrossier". Je ne pourrais donc pas, comme habituellement dans cette série consacrée aux omnibus, faire une rétrospective des modèles présentés dans ces revues. En effet:
- Dans la Carrosserie française, je n'ai retrouvé qu'un un seul modèle paru, d'ailleurs assez tardivement, dans l'exemplaire du 15 juillet 1903, sous le N°327. Il n'y est malheureusement décrit que d'une façon très sommaire.
"Ce modèle très sportif peut tenir lieu de mail et est d'un prix bien inférieur.
Les dimensions du train sont calculées sur une largeur de caisse de 1,400 extérieurement à hauteur de ceinture; la largeur du coffre en bas, au lissoir, est de 0,930; le coffre saille de 0,010 de chaque côté sur la cave peinte en rouge sur notre dessin"
-Lagard Carrosserie française du 15 Juillet 1903-
- Le "Guide du carrossier" n'a, semble t'il, édité seulement deux modèles. Ma documentation étant incomplète, je n'ai retrouvé que les dessins.
Le deuxième modèle offre la particularité d'avoir été l'un des premiers exemplaires exécutés. Il s'agit d'un Omnibus-mail présenté par les frères Alfred et Emile D'Itieren , à l'Exposition internationale de Bruxelles, en 1880. C'est une voiture qui, par ses dimensions imposantes, peut se confronter facilement aux coachs dans les manifestations de coaching.
Les caractéristiques de ce premier Omnibus-mail connu sont ainsi décrites par Catherine Rommelaere, dans son ouvrage "Voitures et carrossiers au XVIII° et XIX° siècle".
"Six personnes pouvaient trouver place à l'intérieur, trois autres sur la banquette d'impériale et deux sur le siège du cocher. Le coffre, très spacieux, était séparé en deux compartiments dont l'un était accessible de l'intérieur, tandis que l'autre possédait deux petites portes latérales. A coins arrondis et ne possédant qu'une grande glace de chaque côté, ce modèle fit sensation."
En 1882, un autre grand carrossier belge; François Schürman, présente, dans "dessins de voitures" un modèle quasiment identique.
Les frères D'Itieren, quant à eux, remportent la médaille d'or à l'Exposition universelle de 1885 avec un deuxième modèle à caisse rectangulaire pieds de coupé et deux glaces latérales.
Plus tardivement, en 1897, c'est un troisième carrossier belge; Guillaume Vandeplas, qui donne à ce type de voiture un cachet tout particulier, le rapprochant de celui du coach, et une ligne reconnaissable entre toutes. "A Bruxelles, en 1897, il exhibait son premier omnibus-mail dont la caisse, bien qu'ouvrant vers l'arrière comme un omnibus classique, offrait cependant le profil en bateau d'un coach avec ceinture relevée vers des pieds corniers et une petite glace latérale munie de croisillons, surmontant une large frise. Les custodes peintes en noir, le bas de caisse de couleur vive ainsi que le coffre massif soutenant un siège de cocher, très élevé et monté sur hausse, complètent l'illusion." -C Rommelaere-
Trois modèles de ce carrossier sont encore conservés et, pour certains, présentés dans les manifestations de tradition comme ce modèle provenant d'une collection allemande.
L'attelage de cette voiture fait ressortir son imposante silhouette aux proportions comparables à celles d'un coach.
Le grand coffre dispose de grands tiroirs, pouvant être ouverts de l'intérieur.
Ces deux photos suivantes mettent en lumière les caractéristiques de l'impériale avec à l'arrière de la caisse deux sièges de groom et, à l'avant, un grand siège protégé par une capote.
Le modèle de la maison Binder Aîné, présenté précédemment, et celui, ci-dessous, de la maison Vandenplas conservé à Leek, proposent une organisation différente de l'impériale. Les deux banquettes, montées dos à dos, sont séparées par le coffre à pique-nique.
Le client étant roi, la maison Vandenplas propose également d'autres configurations avec un seul siège d’impériale et un coffre doté d'un passage de roue.
Si les carrossiers belges et, en particulier, les maisons D'Itieren et Vandeplas semblent avoir été les pionniers et spécialistes de la construction des omnibus-mail , d'autres carrossiers européens se l'approprièrent comme celui-ci fabriqué par Baujard à Neauphle le Château
L’omnibus-mail de Heinz Scheidel, œuvre de Baujard à Neauphle-le-Château (photo F. Durand0000000000000)
et celui-ci réalisé par Kapler, grand carrossier toulousain dont les produits s'exportaient en Russie, au Mexique, à la Havane,...
Le monde anglosaxon n'est pas en reste avec cette voiture de la maison Atkinson§ Philipson, à Newcastel. A noter que les sièges arrières de postillon ne semblent pas être d'origine.
Nous terminons notre présentation avec cet imposant omnibus-mail à quatre glaces, conservé dans la collection de Carlo Gnecchi Ruscone et construit par le carrossier Cesare Sala.
Ce coaching-omnibus a été commandé à Cesare Sala par un sportman d'origine prussienne, Felix Scheibler.
"Cette voiture, volumineuse mais compacte, peut transporter six personnes à l'extérieur et quatre à six à l'intérieur; elle est laquée en jaune paille et noir et ses particularités sont les suivantes: quatre glaces latérales et trois à l'arrière; toutes à verre biseauté et pourvues de jalousies d'acajou à lames mobiles, avec rideaux de soie bleue, à enroulement, système d'aération de la caisse par bouches à air s'ouvrant à l'avant; grand siège pour quatre personnes sur l'avant de l'impériale, frein à levier pour le meneur et frein volant à droite pour le groom.
Cannage en ceinture autour de la caisse, balanciers métalliques avec poupées au dessus de la volée fixe, grand coffre à l'avant, séparé du coffre "secret" intérieur, boiseries d'acajou et, pour toutes garnitures et coussins, tissu en crin de cheval à l'intérieur et à l'extérieur.-Carlo Gnecchi Ruscone-
Cette voiture est un bon exemple de l’extrême qualité de ces véhicules d'exception.
Patrick Magnaudeix
Documentation:
Catherine Rommelaere: Voitures et carrossiers au XVIII° et XIX° siècle
jean Louis Libourel: "La deuxième route des omnibus " Le salon de l'omnibus" (source attelage -patrimoine.com)
Carlo Gnecchi Ruscone: "Attelage tradition et élégance"
Photos:
I.L. Libourel, S Broecks, François Durand, Tradition Fahrkrunst, fédération française de carrosserie, Mario Broekhuis, collection de l'auteur,