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Les chars funèbres français se caractérisent, même pour les plus luxueux, par des formes simples et épurées.
Ces chars funéraires se différencient donc de ceux des autres pays occidentaux qui, pour les plus élaborés; œuvres de carrossiers de voitures de luxe, présentent des formes très travaillées, agrémentées d'éléments sculptés.
Exemples de chars funèbres provenant du Canada, d'Allemagne, des Etats Unis et les trois dernières d'Espagne.
Pour comprendre cette spécificité française, il est nécessaire de faire un bref retour sur l'histoire particulière des rites funéraires en France.
Historique des rites funéraires dans l'ancien régime
Au haut moyen âge, la loi romaine qui prescrivait l'interdiction des inhumations au sein des cités est remplacée par une coutume chrétienne; celle de se faire inhumer à "l'ombre de la croix". En contrepartie de dons importants au clergé, les personnages de grande notoriété peuvent se faire inhumer au sein même de l'église. Progressivement, l'ensemble de la population veut être enterré au plus près du lieu consacré.
Jusqu'à la fin de l'ancien régime, les cérémonies funéraires et le cimetière paroissial sont gérés par l'église au travers des fabriques; ensemble de clercs et de laïcs chargés de l'administration des biens de la paroisse. La présence des cimetières au sein de la cité facilite le déplacement des corps qui, le visage découvert et enveloppés dans un suaire; la "sarpillère", sont transportés sur un brancard; la 'bière", vers le lieu de sépulture.
En cas de nécessité ou pour de hauts dignitaires, les corps sont transportés sur des voitures. Elles sont recouvertes d'une draperie protégeant le cercueil du regard du public. Ces véhicules sont souvent des voitures d'utilisation courante, remaniées pour l'occasion, mais il existe également des chars uniquement dédiés à cette fonction. D'ailleurs, un décret de 1678 en attribue la fabrication aux seuls selliers-carrossiers.
Pour répondre à l'afflux de cadavres dans les cimetières paroissiaux, les pauvres, soit la majorité de la population, sont enterrés par couches dans des fosses communes pouvant contenir jusqu'à 2000 corps. Malgré ces ensevelissements collectifs, les cimetières sont vite surchargés et les fosses doivent être vidées pour accueillir de nouveaux corps. Les ossements sont alors placés dans les charniers; sortes de cloîtres entourant le cimetière, éventuellement dans les combles même des églises.
Devant les problèmes d'insalubrité ainsi provoqués, Louis XVI, en 1776, proscrit l'inhumation dans l'enceinte des églises et recommande d'éloigner les cimetières des villes, ce qui déclenche de nombreuses résistances de la part du clergé. Il faut attendre le scandale du cimetière des innocents où les murs des charniers s'écroulent, en 1780, pour qu'une politique d'externalisation des cimetières hors de la cité soit initiée. Le cimetière des innocents est rasé en 1786 et les ossements de ses charniers sont les premiers à être déposés dans d'anciennes carrières; "les catacombes".
A la fin de l'ancien régime, les premiers cimetières créés à l'extérieur des villes sont séparés en plusieurs parties; ainsi le "Magistrat de Lille" décide de créer un nouveau cimetière divisé en quatre clos; solennel, demi solennel, bourgeois, pauvres, et d'y enterrer "suivant le rang que chacun a tenu dans la société."
Le refus de cette ségrégation sociale, poursuivie jusque dans la mort, interpelle la bourgeoisie éclairée du siècle des lumières et se répercute dans les décisions du mouvement révolutionnaire initié en 1789.
La révolution bouleverse totalement l'organisation des rites mortuaires en mettant en avant l'égalité de tous, y compris dans le traitement des funérailles et des lieux de sépulture.
La rupture révolutionnaire
La volonté de déchristianisation, qui s'exprime dans la vente des biens ecclésiastiques, la persécution des prêtres et la dissolution des sociétés charitables, s'attache également, au nom de l'égalitarisme, à supprimer "la pompe" des funérailles. L'arrêt de l'organisation des funérailles par l'église laisse un vide investi par des "entrepreneurs d'inhumation" (ancêtres des entreprises de pompes funèbres).
Dans le chaos de cette période, le nouveau pouvoir essaye de réorganiser la gestion des cimetières et des obsèques:
-1791: l'assemblée nationale confirme la suppression des cimetières intramuros et décide de les vendre, dans un laps de temps de dix ans, comme biens nationaux.
-1794: la municipalité de Paris préconise l'ouverture de quatre grands cimetières hors de la capitale mais les troubles politiques reportent cette décision de plusieurs années.
A la fin de la révolution, les conditions d'inhumation et les pratiques des "entrepreneurs d'inhumation" sont telles qu'elles sont jugées épouvantables et même indécentes par l'opinion publique. Il faut cependant attendre la période napoléonienne pour que s'ébauche une véritable politique funéraire.
La reprise en main napoléonienne.
Devant cette situation, Napoléon confie au conseiller Segur la direction d'un long processus de délibération pour établir une nouvelle organisation de la politique d'inhumation. Ce "Rapport des sépultures" remis en 1803, va aboutir à un décret affirmant les bases de la nouvelle politique funéraire:
"Le décret du 12 Juin 1804 sur les sépultures s'apparente à "un acte de fondation d'un nouveau culte des morts": la création du cimetière moderne et l'exil des morts, la restauration d'un culte des morts, l'empreinte religieuse et familiale sur la sépulture conjuguée à l'établissement des nécropoles comme espace public inaliénable et enfin le retour à une conception plus limitée de l'égalité au nom de l'expression privée de l'hommage." -Le mouvement social 2011/4-
Ce régime d'inhumation s'apparente à un dispositif de partage des prérogatives, laissant cependant la place centrale à l'église, entre les autorités civiles et religieuses sans exclure l'implication du secteur privé des "entrepreneurs d'inhumation".
Voici quelques éléments de cette nouvelle organisation:
-Créations de cimetières à l'extérieur des villes avec l'établissement d'un régime de concession.
-Interdiction des fausses communes; les corps ne sont plus simplement recouverts d'un linceul mais sont inhumés dans un cercueil, déposé dans des fosses individuelles.
-Affirmation de l'autorité du maire sur la police des cimetières et les modalités de transport des corps avec proscription du transport à bras et l'obligation d'utiliser des chars funèbres attelés à deux chevaux se déplaçant au seul rythme du pas.
-Sous l'autorité du clergé, l'exclusivité du service des pompes funèbres est confiée aux fabriques et consistoires des paroisses qui peuvent le déléguer à des entrepreneurs privés ou à des communes. La paroisse a l'obligation de fournir un service ordinaire garantissant un protocole minimal pour l'inhumation des indigents. Mais elle peut également fournir un service extraordinaire permettant aux familles plus aisées d'organiser des funérailles avec pompe et culte. La rétribution de ce service participera largement à l'enrichissement des finances de l'église de France.(1)
Avec cette nouvelle organisation, les convois funèbres, exceptionnels sous l'ancien régime, vont progressivement s'installer dans le quotidien des populations. Si la volonté d'égalité, vestige de la révolution, s'affirme par le droit à des obsèques décents pour tous, le faste des funérailles dépend donc de la fortune des familles. C'est l'avènement des classes d'enterrement, qui par leur nombre et leurs niveaux de prestation sont spécifiques à chaque paroisse. Elles perdureront jusqu'à la deuxième partie du XX° siècle en gardant cet acquis de la révolution d'un accès gratuit pour les plus pauvres à des funérailles décentes.
Facture d'enterrement, vers 1900, pour une dernière classe indiquant en nota que cette prestation est gratuite pour les indigents.
Les classes d'enterrement
Le nombre et la qualité des classes d'enterrement dépend bien évidemment de l'importance de la cité. Le tarif du cahier des charges des pompes funèbres de Paris, homologué par décret le 2 Octobre 1852, nous permet de découvrir la spécificité de chaque classe d'enterrement dans une grande ville qui en propose neuf. En voici quelques extraits.
Tous les détails des prestations de la cérémonie sont donc précisés:
-le décorum; présence de tentures, la sonnerie des cloches de l'église, le nombre de cierges déployés, l'ornementation des maisons des défunts, de l'église,...
-la qualité et nombre des intervenants religieux ou civils.
- et pour le transport de la dépouille, les types et le nombre des véhicules utilisés ainsi que la spécificité de leur cavalerie. Cette grande diversité des classes d'enterrement oblige les services de pompes funèbres à avoir à disposition un parc important de voitures, des ateliers de construction et de réparation, et des écuries. En 1892, l'ouvrage "Paris ignoré" de P. Strauss précise que le service des équipages des pompes funèbres abrite dans ses locaux:
*des écuries qui accueillent 291 chevaux noirs, 14 blancs, 59 de couleur.
*des remises qui abritent: 15 berlines de clergé et de famille pour les deux premières classes, 115 berlines drapées pour les autres classes, des chars funéraires; 3 de première classe, cinq de seconde,10 de troisième,11 de quatrième et 146 de sixième, septième, huitième et du service ordinaire.
L'éloignement des cimetières du centre des villes a donc entrainé l'utilisation de deux types de véhicules particuliers.
Les différents véhicules du convoi funéraire
Le convoi funéraire se compose de voitures de deuil et du char funéraire proprement dit. Dans de grandes cérémonies, des chars spécialement aménagés pour le transport des fleurs et couronnes mortuaires peuvent y être ajoutés.
Convois funèbre nous permettant de discerner une voiture de deuil ou de clergé précédant le char funèbre.
Voitures de deuil:
La dénomination de voiture de deuil désigne les berlines ou coupés qui sont chargés du transport des familles et du clergé.
Ce sont en général des voitures courantes peintes en noir mais elles peuvent aussi être drapées.
Les chars funèbres dit aussi corbillards
L'origine de l'utilisation de ce terme n'est pas strictement déterminée. Au XVII°, c'est une grande voiture à caisse fermée par des rideaux qui sert au transport de la domesticité. C'est aussi le nom des coches d'eau approvisionnant Paris depuis Corbeil-Essonnes nommés "corbeillards" et qui auraient, lors d'épidémies, transporté les morts en dehors de la capitale.
Au vu du changement "brutal" des modalités d'inhumation, entrainé par la nouvelle règlementation napoléonienne, il est probable que, comme sous l'ancien régime, on utilisa, au départ, des voitures existantes détournées de leur utilisation première. Ceci est d'autant plus plausible que nombre de voitures de la noblesse vendues comme biens nationaux sont, à cette époque, encore disponibles sur le marché.
Le char funèbre qui fut utilisé lors des obsèques, en 1809, du général Lannes et que nous connaissons actuellement, très modifié, sous le nom de char funèbre de Louis XVIII, nous donne un exemple de ce "recyclage" de véhicules existants. Il a été construit "... vraisemblablement avec des éléments préexistants assemblés à la hâte: une caisse provenant sans doute d'une berline- elle possède, en effet, des portières invisibles sous les tentures-, deux flèches pour le train, signées Prelot, des ressorts et une barre de volée d'avant-train signés Devaux ( deux carrossiers fournisseurs des écuries impériales) et peut-être aussi les roues dont les moyeux portent, gravée, la signature du carrossier Daldringen..." - J.L. Libourel : "Char funèbre de Louis XVIII" dans l'ouvrage collectif "Roulez carrosses."-
Caisse du char funèbre avant sa restauration qui laisse découvrir la caisse de berline de voyage initiale.
Rapidement, sans pour autant abandonner cette pratique de récupération de voitures existantes, les professionnels réalisent des voitures spécifiques à ce transport. Ce sont des voitures de qualité courante fabriquées par des entreprises spécialisées ou les ateliers des services des pompes funèbres des grandes villes mais, plus largement, par les charrons; terme qui est employé au XIX° par les chambres syndicales pour définir l'ensemble des constructeurs de voitures de travail et de commerce.
En France, mis à part quelques exceptions dont le monumental char funèbre, dit des funérailles de Louis XVIII, les corbillards sont d'une grande simplicité de construction. Le directeur de la revue "La carrosserie française", L.Lagard, l'explique avant tout par des justifications morales.
"La douleur n'admet pas et ne veut pas admettre qu'on puisse la distraire par de vains ornements, rien ne peut embellir la mort d'une créature qui vous est chère, et si les exigences terrestres obligent à penser au décorum, il le faut faire de telle façon que l'ornementation en soit simple, froide, morne et ainsi en conformité parfaite avec le sentiment de tristesse; il faut en un mot que le constructeur, et surtout le garnisseur chargé de la draperie, cherche son effet, à l'exemple des grands artistes, dans la simplicité".
Il est nécessaire d'y ajouter des considérations strictement économiques. En effet, ces caisses relativement neutres peuvent être facilement modifiées par l'ajout d'éléments extérieurs amovibles; galeries, panaches,... et de garnitures textiles. Cette adaptabilité permet d'utiliser le même véhicule pour plusieurs classes d'enterrement.
" Inutile de dire que la galerie est mobile ainsi que les tentures, une seule caisse peut donc servir à trois ou quatre classes. c'est ainsi que cela se passe à la Compagnie des pompes funèbres de Paris" -Lagard Carrosserie française-
Le diaporama suivant, représentant les obsèques des 24 victimes de la tentative d'assassinat contre Louis Philippe en 1835, nous en donne un bon exemple. Suivant les voitures du clergé, les premiers chars sont identiques et différenciés simplement par une garniture blanche pour un char destiné à un enfant et des drapeaux pour ceux des militaires. Les trois derniers chars, précédant le monumental char funèbre dit de Louis XVIII°, destiné a la dépouille du général Mortier, sont d'un modèle plus imposant et simplement différenciés, suivant la place des défunts dans la hiérarchie militaire, par les attributs qui les équipent; dôme, panaches, galeries.., l'importance des garnitures textiles, le nombre de chevaux attelés et la qualité de leur habillage.
Cette utilisation d'un même véhicule pour plusieurs classes d'enterrement est encore plus incontournable pour les services de pompes funèbres de cités aux budgets plus restreints. Citons l'exemple de la ville de Sedan qui a donné, en 1890, l'adjudication de son service de pompes funèbres à une entreprise qui ne possède que deux modèles de corbillard. Un, monté sur un train à huit ressorts, pour les premières et deuxièmes classe et un second dont voici les photos pour toutes les autres classes.
Au XIX° siècle, la classe d'un corbillard se détermine donc par le type de la voiture utilisée mais surtout par les garnitures textiles et par le nombre, la couleur de robe, et la qualité de l'habillage de ses chevaux.
Les garnitures textiles
Les garnitures textiles accompagnent l'ensemble des phases de la cérémonie des obsèques. Elles peuvent être présentes sur les murs des maisons des défunts et de l'église mais également, bien sûr, dans l'habillage du corbillard et des chevaux.
-Garnitures du corbillard
Elles sont sont généralement noires, couleur symbolique du deuil depuis le moyen âge, pour les obsèques d'adultes et blanches ou ivoire pour les obsèques d'enfants.
Ces garnitures se déclinent en pentes, embrases, housses de siège, drap mortuaire; le "poele" recouvrant le cercueil,... Ces éléments sont, suivant le niveau de la classe d'enterrement, ornés d'un simple galon ou d'une passementerie plus complexe, réalisée en fil argenté ou en laine; Cette passementerie se compose de galons, franges, glands, écussons, torsades et est complétée par diverse broderies ou monogrammes. Voici quelques exemples de garnitures de première classe, proposés par la maison Carrier de Lyon.
La collection de Patrick Kesteloot recèle plusieurs corbillards dont cet exemplaire muni de ses deux garnitures, correspondant à deux classes intermédiaires d'enterrement.
-Garnitures des chevaux
Le nombre de chevaux, leur qualité et la couleur de leur robe participent, comme les parures textiles qui les recouvrent, à la définition de la classe d'enterrement. Un char funèbre de première classe est attelé à quatre chevaux carapaçonnés et aux têtières ornées de plumets, celui d'une classe intermédiaire de deux chevaux munis d'une simple étole galonnée alors que le corbillard des indigents ne disposera que d'un seul cheval dénué de toute parure.
Corbillard de troisième classe de la ville de Lyon dont les chevaux ne sont équipés que d'un simple drap galonné.
En opposition au symbole de domination sociale que représente les ornements des corbillards de première classe, Victor Hugo se fera conduire à sa dernière demeure dans un "corbillard de pauvre" dépourvu de toute ornementation.
L'autorisation du choix entre obsèques civils ou religieux en 1887 et l'attribution, en 1904, du service public des pompes funèbres aux seules communes ne laissant aux cultes que les célébrations religieuses, les influences anglosaxonnes participent progressivement à la diminution des "fastes" de l'ornementation des chars funèbres.
Les chars funèbres
La diversité des véhicules utilisés est assez importante dans les détails mais, en fait, se focalise qu'autour de quelques modèles de base que nous retrouvons dans les journaux professionnels.
Après avoir présenté les caractéristiques générales de ces corbillards, nous traiterons de différents modèles de base dont les dessins et plans furent diffusés dans "Le guide du carrossier" et "La carrosserie française".
-Caractéristiques générales des corbillards
- Train
Cette voiture mortuaire destinée au transport d'un cercueil est montée sur un train à quatre roues, plus rarement à deux.
Les suspensions, initialement composées de ressorts en C au début du XIX° siècle, sont remplacés par des ressorts à pincettes et, pour certaines voitures de première classe, par des montages à huit ressorts. Sur certains modèles, les suspensions sont renforcées pour pouvoir transporter les cercueils en plomb ou, éventuellement, les transformer en chars destinés à transporter les couronnes mortuaires dans les grandes cérémonies.
-Caisse
"Le train porte un grand plateau, souvent entouré de panneaux peu élevés et couvert d'un baldaquin reposant sur quatre support verticaux placés aux angles. Le cercueil est posé à même le plateau, ou sur des rouleaux de bois fixés sur celui-ci; il peut aussi être dissimulé dans un coffre établi sur le plateau." -Voitures hippomobiles" de Jean Louis Libourel
Le pavillon du baldaquin est, dans certains modèles, doté d'un dôme plus ou moins important. S'il est souvent présent sur les voitures de première classe il est à souligner que quelques fabricants s'en sont fait une spécialité quelque soient les classes auxquelles ces voitures sont destinées.
-Les modèles de voiture:
Entre 1860 et 1914, "Le guide du carrossier" et "La carrosserie française ne présentent que huit voitures différentes dont trois sont largement déclinées dans tous les ateliers de construction du territoire.
Le char rond
Ce modèle s'utilise, dès le début du XIX°, pour le transport des indigents et pour les dernières classes d'enterrement d'où son appellation par le peintre Adam de "corbillard des pauvres". Non suspendu, il est mené par un cocher assis sur un siège monté sur ferrure. Le pavillon du baldaquin est bombé d'où le nom de char rond qui lui est attribué. On peut noter que, respectant la législation initiale de Napoléon, il est encore attelé à deux chevaux, en 1840.
Estampe intitulée "Corbillard du pauvre corbillard du riche" Adam entre 1840 et1844 (Source musée Carnavalet)
Des déclinaisons de ce modèle continuent à être fabriquées jusqu'à la fin de l'utilisation du corbillard hippomobile. En voici un exemplaire présenté dans "Le guide du carrossier".
Attelé à un seul cheval, il se différencie du modèle précédent par la présence d'un train doté de ressorts à pincettes,
-d'un siège cocher monté sur un coffre en bois
-d'un coffre protégeant le cercueil du regard.
Ces modèles de conception minimaliste donneront naissance à une multitude d'exemplaires ne se différenciant que par la taille et quelques détails esthétiques; le pavillon; plat, bombé ou doté d'un dôme, le siège cocher; monté sur coffre en bois ou sur ferrure, la forme des montants de baldaquin souvent tournés.
Certaines petites communes pauvres ne proposeront que de simples plateaux, éventuellement des voitures à deux roues ou même de simples voitures à bras.
Bien que destinés aux enterrements des dernières classes, un autre type de corbillard fera appel quant à lui, à un travail de carrosserie un peu plus élaboré. Il a la particularité de répondre à deux fonctions de transport; celui du cercueil et celui du clergé réunis dans une seule voiture.
Nous en retrouvons une déclinaison dans ce prospectus publicitaire.
Corbillards des classes d'enterrement intermédiaires
Ce modèle, proposé par le journal La carrosserie française, a un pavillon sur lequel peuvent s'adapter différents types de galeries correspondant a différentes classes d'enterrement intermédiaires. Les panneaux de caisse latéraux par leur courbure donnent à l'ensemble du bas de caisse une forme reprenant celle d'une berline. Selon les voitures, cette courbure sera plus ou moins aplatie. Dans ce dessin, le siège du cocher est monté sur coffre mais certains modèles sont montés sur ferrure.
Corbillards des premières classes d'enterrement
Ce corbillard, présenté par "La carrosserie française", est utilisé dans cette configuration comme un corbillard de troisième classe mais, par l'ajout de dôme, panache et galerie plus sophistiquée, peut être utilisé dans les deux premières classes.
Il s'apparente au modèle ci-dessous appartenant à la collection Kesteloot. Sa description nous permet de découvrir plus facilement ses caractéristiques qu'un simple dessin. Il a, de plus, conservé l'ensemble des ses garnitures.
Ce corbillard, aux panneaux de caisse assez incurvés dans leur partie infèrieure et plus légèrement dans leur partie supérieure, est monté sur ressorts à pincettes à l'avant et demi-pincettes à l'arrière.
Le pavillon du baldaquin est surmonté d'un dôme recouvert d'un drap brodé d'étoiles et cloisonné par des galons. Des coupes en forme de tulipes recevant les panaches de plumes ornent les quatre coins du pavillon.
La galerie de bronze doré, largement ouvragée, intègre dans ses longueurs deux cadres recevant le "chiffre" du défunt. Cette galerie amovible, ornée de quatre fleurons en tête d'ange, est utilisée avec la garniture blanche de ce corbillard pour les obsèques d'enfant.
La partie arrière est dotée d'une petite porte surplombant une planche dotée d'un marchepied. Les "têtes de moutonnets" en forme de crosse sont imposantes.
Le siège à housse du cocher est monté sur ferrures. La coquille et une traverse sont décorées de frises végétales.
Les deux photos suivantes permettent de découvrir ce corbillard de première classe dans les deux utilisations auxquelles il est destiné.
Corbillard précédent présenté avec l'ensemble de garnitures textiles utilisées pour un enterrement d'adulte.
Certains de ces corbillards de première classe sont montés sur des trains à huit ressorts donnant un aspect beaucoup plus prestigieux que de simples ressorts à pincette.
Les modèles photographiés ou conservés me laissent à penser que ces trains provenaient le plus souvent de voitures de luxe et qu'ils étaient adaptés pour recevoir des caisses de corbillards existants, leur donnant ainsi plus de prestige. C'est, me semble-t-il, le cas de ce corbillard des deux premières classes des Pompes funèbres de la ville de Sedan, à la caisse ordinaire mais qui est monté sur un train à huit ressorts pourvu d'un siège à l'anglaise; siège à housse surplombant un coffre tonneau. Le coffre tonneau, de par sa forme d'exécution difficile, est un "chef d'œuvre" que doivent réaliser les maîtres compagnons pour l'obtention de leur diplôme. Nous avons donc le montage d'un travail de charronnage sur un élément de voiture de gala.
Ces trains de voitures provenaient souvent de dons d'élites locales pour leur paroisses et, à partir de 1904, leur commune. On retrouve un autre exemple de ré-utilisation de train de voiture de luxe dans cet autre char funèbre de la collection de Patrick Kesteloot.
La caisse est sûrement assez tardive avec une influence de la mode anglosaxonne sur ses ornementations; quasi disparition des tentures textiles, peinture florale couleur or sur les panneaux, présence de guirlandes sculptées, de lanternes et d'une imposante galerie sur le pavillon.
-Des chars exceptionnels, œuvres de la carrosserie de luxe
A la marge de la construction de masse de corbillards par les charrons et entreprises spécialisées, les maisons de carrosserie de luxe ont contribué à la réalisation de chars funéraires, soit pour une commande d'état comme les interventions réalisées sur l'exceptionnel char funèbre dit de Louis XVIII, soit pour des réalisations destinées à l'exportation.
-Char funèbre de Louis XVIII
Après son utilisation pour les obsèques du général Lanne, en 1809, il a été remanié, à plusieurs reprises, sous la direction des architectes des menus plaisirs Lecointe et Hittorff:
- en 1820, pour les obsèques du duc de Berry; travaux effectués par le carrossier Prelot, le sculpteur Roguier et le peintre Gautier.
-en 1824, pour les obsèques de Louis XVIII; travaux effectués par le carrossier Dalringen, le sculpteur Roguier et le maître tapissier Isodore Renault.
Vous retrouverez plus d'informations dans l'article que nous avons déjà publié sur cette voiture.
Musée des carrosses de Versailles 2; Char funèbre Louis XVIII - attelage-patrimoine
Musée des carrosses de Versailles 2; Char funèbre de Louis XVIII Comme nous l'avons décrit dans l'article La collection du musée des voitures de Versailles en 1851. , la collection du Musée de...
-Chars funèbres dédiés à l'exportation
Il est difficile d'en connaître le nombre mais un article de "La carrosserie française" sur un char de la maison Faurax destiné à Montévidéo nous permet d'apprécier la qualité de ces productions.
ANNEXE
(1)
Cette réforme législative constituera la base de l'organisation des rites funéraires au XIX°. Ce n'est qu'en 1887 que la troisième république autorisera le choix entre obsèques civils ou religieux. En 1904, en préalable à la loi sur la séparation de l'église et de l'état, l'état confie aux communes le monopole du service public des pompes funèbres; personnel, corbillards et véhicules de deuil, tentures extérieures des maisons, cercueils et gestion des cimetières. Il laisse aux cultes la gestion des cérémonies religieuses.
Texte:
Patrick Magnaudeix
Photos et iconographie
Gallica BNF, musée carnavalet, Patrick Kesteloot, Patrick Magnaudeix.
Documentation:
Economie morale de la mort au XIX° siècle. Regards croisés entre la France et l'Angleterre.-Pascal Trompette, Howell Griffith-
Les pauvres et la mort au XIX° siècle-Madeleine Lasserre-
Evolution de la sociologie funéraire -Muriel Perrin-Guys-
L'historique du service extérieur des pompes funèbre-DARES-
Quelques aspects de l'histoire funéraire dans la civilisation Judeo-chrétienne en France -Pascal Moreau-
"Voitures hippomobiles" -Jean Louis Libourel-
"Char funèbre de Louis XVIII" -Jean Louis Libourel-
...
Photos et iconographie
Gallica BNF, musée carnavalet, Patrick Magnaudeix, Patrick Kesteloot.
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