LA CHAISE DE
POSTE :
Naissance du projet :
Pour l’intérêt suscité, je souhaite donner une suite à mon article du 26 Janvier 2011, sur
la création de « Modèles réduits et marqueterie », de la catégorie Histoire des voitures à cheval.A l’époque, j’avais un choix délicat, entre deux projets : Le coucou, voiture qui desservait la
périphérie de Paris, ou bien réaliser une chaise de poste.La première étape
commence toujours par la constitution d’une documentation. Avec internet les informations trouvées sont plus conséquentes sur la Chaise de poste.Je souhaite vous faire partager cette nouvelle aventure. L’histoire de ce véhicule est
captivante.
Histoire de la Chaise de Poste :
La chaise de poste est une voiture hippomobile de la catégorie des
« monoplaces », apparue au XVII siècle, elle possède deux roues, c’était une voiture de voyage rapide, car légère. Elle était attelée
à des chevaux de poste, bien souvent, les relais étaient avertis de l’arrivée si le passager était
important ou si il s’agissait de courriers royaux.
La caisse est suspendue entre les brancards, à l’avant par des soupentes en cuir tendues
par des crics, à l’arrière, soit par des ressorts dits à l’écrevisse, soit par des ressorts à la Dalesme, suspension en Cul de singe. Elle est retenue latéralement par deux courroies
de guindage en cuir (afin d’empêcher les oscillations latérales). Plus tard, des chaises à deux places, et de types variés seront en
circulation.
L’accès se fait par l’avant, par une porte (ou botte ou « portière à la Toulouse »), se rabattant sur le « tablier » de cuir garde-crotte, ou par une pièce de cuir nommée
« soufflet ». Des goussets assurent l’étanchéité par un recouvrement en bas de portière.
La voiture était normalement attelée à deux chevaux, l’un entre les brancards, il
supportait une partie du poids de la voiture, le second (le Porteur) à gauche du premier et monté par un postillon, était attelé à un palonnier. Il pouvait avoir un troisième cheval (le
Bricolier), attelé lui aussi à un palonnier à droite.
Je reste admiratif pour la conduite particulière de ce véhicule, cela nécessitait une
dextérité toute spécifique, car le postillon devait veiller au bon équilibre des masses. Il était tenu de porter un uniforme et un écusson en métal sur le bras gauche. Ses grosses bottes
protectrices, me laisse penser à la dangerosité et aux difficultés de circulation (passage étroit, chute du cheval)
Au fur et à mesure de mes investigations, j’imagine aussi le supplice enduré par le
«passager », notamment par l’exigüité de la voiture. Compte tenu de l’état des routes, afin d’atténuer les cahots du transport, la caisse étant très étroite, le passager n’avait pas la
liberté de ses mouvements. Sans oublier la chaleur, le balancement, les secousses, le bruit…
Il me semble également que l’accès à l’intérieur de la caisse, ne devait pas être aisé. La
porte rabattue à l’avant, offre un passage limité pour se glisser dans l’habitacle.
Les documents recueillis, m’apportent une base de travail, mais des réponses restent
encore à trouver. Ce sont ces petits points de détail qui montrent tout le savoir-faire de l’époque, du concepteur de la chaise de poste qui devait lier la fonction de la voiture et de la
voirie.
Par exemple : Le diamètre des roues à une énorme importance sur ce type de véhicule.
J’ai remarqué le manque de lanterne, la longueur des brancards me semble courte, le degré d’ouverture de la porte attise ma curiosité, etc.…
Il me fallait voir l’un de ces engins !
Visite au château de VAUX-LE-VICOMTE :
C’est décidé, nous nous rendons au château de Vaux-Le-Vicomte (Parcourant les Châteaux,
citadelles, et autres musées, la visite du château de Vaux-Le-Vicomte mérite le coup d’œil, et je vous recommande de profiter de votre séjour pour découvrir également Fontainebleau…)
Accompagné de mon épouse, qui devient photographe en la circonstance, la voiture tant
« désirée » est devant nous, prise sous toutes les coutures, en long, large, travers…Quant à moi, muni d’un double mètre, crayon, papier, je trace, je mesure, je cherche à
comprendre, j’imagine…
Rien n’est comparable, admirer cette voiture, en réel, à l’échelle 1/1, elle me semble
plus imposante ! Ce n’est plus une image plate, le relief fait apparaître des détails insoupçonnables, me livrant ainsi presque tous ses secrets.
J’ai enfin, toutes les réponses à mes interrogations. Dans mon esprit les vues en 3D
s’affichent comme un diaporama. Je ne me suis pas trompé, mon projet prend forme, la phase « documentation » est complète, je peux passer à la seconde étape : La
réalisation.
La
préparation :
Je souhaite intégrer de la marqueterie, afin de représenter au mieux ce modèle. Après
avoir réalisé mes calculs pour obtenir un modèle à l’échelle 1/10. Je complète mes besoins en matière première. Les essences que je vais utiliser sont le bois rouge pour son manque de nervure, le
samba pour sa blancheur, épicéa pour ses fibres, hêtre pour sa dureté.
Il n’y a que du bois dans mes créations, pas de métal, ce choix impose de lister les
contraintes selon l’usage de la pièce à réaliser (mécanique, symétrie, rotation, articulation, aspect…).
C’est aussi l’identification du bois à utiliser selon ses caractéristiques (bois tendre,
dur, limite de rupture…)
Ce qui me semble important à cette étape préparatoire, c’est de prévoir les pièces
critiques avant fabrication.
Par exemple : Chaque paire de soupente est réalisée dans un bois sans nervure (risque
d’éclatement, de fêlure) j’opte pour un bois rouge, à travailler dans le sens de la fibre. Ces pièces sont destinées à supporter le poids de la
caisse (350 grammes), ce qui va générer une tension. C’est aussi le point d’ancrage de l’articulation à chaque extrémité. Ces données me permettent de définir l’épaisseur de la soupente :
1.5 mm avec une tolérance de +0.5.
Ces sous-ensembles sont stratégiques, ils garantissent la perpendicularité de la caisse
avec le châssis. A ce niveau, la sanction d’une imprécision est immédiate, elle est visuelle : Pour une différence calculée de 1 mm en longueur
entre la soupente droite et gauche au bas de caisse, l’écart en haut de la caisse est du double !
La
réalisation :
J’ai distingué trois parties principales, chacune représente un groupe de
sous-ensembles : le châssis, la caisse, les roues. Le châssis, se
compose de 143 pièces, quatre traverses, un montant droit et gauche, des suspensions « cul de singe », soupentes avant et arrière, la tablette arrière (en marqueterie), du support
essieu, etc.…
La caisse, pièce maîtresse représente 470 pièces, flasques droit et gauche, plancher, toit, fond, porte, fenêtre siège, les coffres du toit, et de la cave, poignées et autres ancrages… Les roues, jantes, rais, moyeux, essieu. Au total, environ 650 pièces constituent la maquette.
Il n’y a pas de protection en peinture ou vernis à mes maquettes. J’estime que le rendu naturel des couleurs du bois poncé, est un plaisir pour les yeux.
Sans comptabiliser le temps passé à la recherche de la documentation, sans non plus
prendre en compte l’étape de réalisation en marqueterie du diorama, la réalisation de la chaise de poste m’a captivée durant sept mois, avec environ 525 heures de « plaisir ».
Je suis heureux de pouvoir considérer ce projet comme terminé. Pour ce véhicule je ne peux
rien faire de mieux, je suis satisfait par son élégance, les parties essentielles de l’original sont respectées, la marqueterie donne un cachet « royal ». C’est la fin de l’aventure.
Mais, j’avais prévu, il y a quelques semaines déjà, une autre voiture, c’est un…mais chut, ce sera l’occasion de faire un prochain article.
Conclusion :
Je conserve en mémoire, le « Coucou », qui mérite bien une reconnaissance, je
n’ai pas trouvé beaucoup de renseignement sur ce moyen de transport, si vous avez une adresse, une documentation, je vous en remercie par avance…
Lorsque j’ai une invitation, c’est avec un immense plaisir que je participe à des
expositions. Le contact avec le public est formidable. Je présente quelques réalisations, et un dialogue s’installe naturellement…Chaque échange est instructif, je suis toujours très impressionné
par ces « vécus ». C’est aussi durant ces rencontres que je fais référence au blog FIGOLI pour la richesse de tous les articles (divers et variés) qui me permettent de découvrir,
d’apprendre, d’évoluer, de rêver…Egalement pendant ces temps forts, je mets en avant une source d’inspiration, au « musée de la voiture à cheval 71110 Marcigny », les voitures de Mr
LACROIX, représentent une diversité d’une collection unique !
Permettez moi également de remercier, mon épouse, qui brave toutes les situations à mes
cotés, pour son aide, son soutien, ses créations en couture, ses photos toujours impeccables…
A vous, passionnés qui perpétuent la mémoire des métiers d’autrefois et la sauvegarde du
patrimoine hippomobile, je vous adresse un grand merci !
Texte et Photos :René Geoffre
Contact:‘rene.geauphre@dbmail.com’
Voici, proposé par Julie Wasselin one représentation
de l'ancêtre de cette chaise.
Il y a dans la collection Hermès un dessin
préparatoire pour le tableau :
" Prise de Condé sur l'Escaut " par Jean-baptiste Martin ( 1659 - 1735 )qui montre Louis XIV, menant l'une de ces premières chaises de poste.
Le déséquilibre de ce genre de voiture devait
être pénible pour le cheval qui
était entre les brancards.