Vous trouverez une présentation très accessible des articles de vos "THEMES FAVORIS" dans le répertoire ci dessous.
Il y a un peu moins d’un an, l’article SOUVENIRS D’UN RECORD de Paris à Trouville se concluait par cette phrase d’Auguste Guiet : « Le compliment le plus sincère et le plus important m’a été adressé dès notre arrivée à Trouville, par MM. Gordon Bennett, Tailer et Higgins, chacun d’entre eux me passant commande d’un mail-coach identique au Herald de M. Tiffany.»
La tentation était grande de chercher d’autres mail-coach sortis du même « moule » et Patrick Saint-Germain, ancien propriétaire du Comet encourageait cette recherche.
L’article L’ART DE CONSTRUIRE LES VOITURES GUIET & C° paru un mois après, permettait de distinguer les différences entre les road-coach et les mail-coach de cette entreprise parisienne très active sur le marché international.
L’actualité hippomobile s’est télescopée avec ces parutions, puisque leNew York Historical Society Museum qui détenait depuis 1944, le Herald rebaptisé Lightning, le mettait en vente chez Martin Auctionneers le 26/04/19. Son nouveau propriétaire, Siegward Tesch de Wiehl, un collectionneur allemand, l’a confié à Dieter E. Gaiser - Historische Restaurierungen, pour des travaux de conservation.
Grace à l’expertise et aux documentations de Dieter Gaiser et Patrick Saint-Germain, nous vous invitons maintenant à rechercher des sister coach du Herald – Lightning.
Cet article est aussi publié en anglais pour les nombreux amateurs qui partagent notre passion.
PORTRAIT TYPE D’UN MAIL-COACH by GUIET & Cie
Dans son interview àl’International Herald Tribune du 27 juin 1892, donc 15 jours avant le record Paris – Trouville, W. G. Tiffany, son commanditaire, donne des précisions utiles sur ce nouveau mail coach :
« Il n'y aura que quatre passagers et le gardien, car il n'y aura plus de place. Les bagages seront empilés sur le dessus, autant que possible sur les roues arrière, comme dans le bon vieux temps, ainsi vous empêchez la partie basse du coach de flotter, et vous pouvez obtenir une vitesse plus grande. »
« Ce type de coach roule très légèrement et je suis sûr qu'il sera le type de coach le plus adapté aux États-Unis, où les routes sont lourdes et où il est difficile de se déplacer sur le sol. Vous pouvez avoir des bagages pour quatre personnes dans le coffre, et même là, le coach est plus léger de 1,000 lbs. [450 kg] qu'un road coach ordinaire. Il me semble que c'est le coach le plus pratique pour les longs trajets. »
En 1901, Fairman Rogers dans A Manual of Coaching, nous donnait déjà un dessin à l’échelle d’un MAIL-COACH by GUIET & Co.que nous reproduisons ici pour illustrer les explications données en mai 2019.La presse et Auguste Guiet, lui-même écrivent que le Herald a été construit sur le modèle des anciens mail-coach anglais, à la demande de W. G. Tiffany qui s’était procuré les dessins à la Post Office de Londres. En comparaison avec les coachs réalisés par Guiet avant l’Herald, celui-ci est une adaptation et non une copie fidèle des vrais mail-coach anglais.
Le Herald avec 1.230 kg à vide est plus léger, il est plus étroit, en dehors du meneur et du garde, il accueille beaucoup moins de passagers – 4 personnes à l’extérieur et 4 à l’intérieur, au lieu de respectivement 8 à 12 et 6. C’est une voiture pour transporter du courrier et quelques passagers, ce n’est plus un public coach ou un stage coach. Si on compare les dessins du Herald et des anciens mail-coach Million Guiet et du road-coach Guiet & Cie, on remarque que le siège du garde est en rotonde, il est pour une seule personne et posé sur un tripode métallique avec une jupe en cuir au lieu d’une banquette de 2-3 personnes fixé sur des hausses [montants en bois posé de chant]. La trappe du coffre à courrier qui est plus profond, s’ouvre par le dessus, alors que pour le road-coach, la porte du coffre est à l’arrière pour ranger outils et pièces de rechange. Le pavillon ne comporte qu’une banquette dans le sens de la marche, il n’existe pas de banquette regardant vers l’arrière, même repliable car il y a un coffre à tromblon et un autre pour des outils.
Le siège du meneur et de son invité est logé dans une boîte de siège en bois avec trois rebords inclinés et arrondis à la place d’une galerie de siège avec plusieurs ferrures rondes (voir photo).
La caisse du Herald est légèrement plus basse sur le train, mais la hauteur totale est presque la même que celle du road-coach, le profil des coffres est plus proche d’un rectangle ou d’un trapèze contrairement à ceux du Herald qui sont presque carrés. La fenêtre dans la porte est maintenant carrée. L’intérieur est tapissé avec un drap épais et cossu, dans les drags il est capitonné comme une voiture privée, celui des road-coaches est lambrissé avec un bois dur et clair comme une voiture publique. Il y a trois marchepieds sur les côtés du coffre avant au lieu de deux. S’il existe une échelle pour monter sur le pavillon, elle est accrochée sous l’essieu arrière, il n’y a ni logement pour l’échelle, ni trappe dans les coffres comme pour les drags ou les anciens mails.
Au niveau du train arrière, la suspension est différente car la masse transportée est bien plus faible que sur un road-coach.
Un des quatre derniers Royal Mail Coach original, fait par Vidler, Mail Coach Factory (MCF) en 1832. (Carriage Museum Siegward Tesch àWiehl, Allemagne)
Le Royal mail-coach possède en effet un siège de garde unique et rond, monté sur des ferrures, pas de banquette supplémentaire sur le pavillon et des coffres qui s’ouvrent par le dessus. Mais il est encore plus léger, moins de 1,000 kg ; il a une caisse plus haute, d’environ 15 cm ; les coffres avant et arrière sont plus profonds pour transporter plus de courrier. Certains modèles possèdent des roues avec des mortaises entrelacées dans le moyeu.
Donc le Herald est un modèle intermédiaire entre le road-coach et le Royal mail coach, créé pour de riches whip américains afin de courir plus vite et plus longtemps.
Au titre des détails décoratifs, le coffre avant du Herald possède une petite crosse entre l’angle du coffre et un marchepied. Les accoudoirs en fer sont typiques avec leurs volutes enroulées.
LES VOITURES EXISTANTES
1 –THE HERALD n° 6586
The Herald, commandé par W.G. Tiffany, construit en mai – juin 1892, est cédé juste après le record du 12 juillet 1892,à T. Suffern Tailer qui l’emmène chez lui à Newport et le rebaptise Lightning, puis le propose en 1927 à E. Victor Loew (1873-1950). Il porte des plaques en laiton « MILLION GUIET & Cie / PARIS » dans les portières et le n° 6586 sur les chapeaux de roue et sur de nombreuses pièces y compris la clé pour démonter les roues.Un coffre à fusil est sur le pavillon [toit]et un autre coffre pour les outils est sur sa face arrière. Sous la banquette arrière, il y a un vase de commodité.
Mais que sont devenues les voitures commandées par les autres participants, à savoir James G. Bennett, et E. Higgins, à l’arrivée à Trouville ?
2 –THE COLUMBIA N° 6587
The Columbia montre toutes les caractéristiques du Herald. Il se trouve à New-York, au Long Island Museumdepuis 1958. Le New-York Herald et le musée l’attribuent à MILLION GUIET. La caisse est peinte en noir mat sauf les bas de caisse, les portières sont marron. Le train, la coquille et les hausses du siège avant sont du même rouge Vermillion. Les garnitures des sièges sont en tissu rouge. Il est complètement identique au Herald dans ses couleurs, sauf pour les bas de caisse et les portières.Un coffre à fusil sur le pavillon et l’autre coffre pour les outils derrière. Avec le n° de série 6587, il est juste après le Herald.
Eugène Higgins avait commandé cette copie du Herald qui est livré fin août 1892, il le vend $825 à James H. Hyde qui le cède pour $1.000 à Paul R. Bonnerle 20.11.1905 qui achète aussi le Liberty seulement $700 car il est plus lourd que le Columbia (New-York Herald, November 21, 1905, p.4) ; mais c’est J.H. Hyde qui le remet en vente en octobre 1913 à New-York.
3 - THE COMET n° 6601
La voiture achetée au Baltimore Museum of Art (Maryland) par P. Saint-Germain a révélée pendant sa restauration en 1994, l’inscription « Comet » sous la peinture rouge de la coquille. Elle possède aussi toutes les particularités du Herald, mais son poids d’environ 1,500 kg serait plus important.Avant sa restauration, les différentes parties du Comet ont les mêmes couleurs que le Columbia.Les chapeaux de roue et les plaques vissées sur les portières portent la marque GUIET & C°– PARIS et non MILLION GUIET. Avec le numéro de série 6601, seulement 14 voitures le sépare du Herald. Sa fabrication date donc de juillet-août 1892.
En septembre 1890, The Reunion coaches de MM. Ridgway, Bennett, Tiffany et baron Lejeune commence le service de Paris à Poissy avec le Comet, qui était un road-coach fabriqué par Holland & Holland la même année,et appartenait à un des membres du club. Il est mis en vente en juin 1891 en même temps que le Meteor chez le carrossier Mühlbacher.
Mais le même Comet reprend la route sur la même ligne, les chroniqueurs parlant du « old coach Comet ». Il n’est pas clairement établi si la voiture a changé de propriétaire ou si elle a été louée.
En mai 1892, T. Suffern Tailer menant le Comet sur la route de Poissy, confie à des passagers qu’il veut l’emmener à New-York pour créer un service entre la 5th Avenue et le Country Club ou bien pour l’International World’s Fair. C’est bien le Comet qui commence le service, mais il est remplacé le 17.10.1892 par The Rapid, un nouveau mail coach fabriqué fin août 1892 par Guiet pour T.S. Tailer d’après l’Herald.
En octobre 1892 (3 mois après le record Paris-Trouville), le New-York Times annonce l’arrivée de Paris du Comet et du Lightning[ex Herald]afind’assurer les liaisons pour les courses à Morris Park. Il doit s’agir de l’ancien Comet. E. Higgins possédant le Columbia, Suffern Tailer le Herald, le Comet devait être à James G. Bennett par déduction, Suffern Tailer restant le coach man. Un autre journaliste a écrit que le Comet a été offert par J. G. Bennett à M. Tailer en remerciements pour ses succès à Paris. Avant sa restauration, il a été constaté que le nouveau Comet n°6601 avait peu roulé. La vie mondaine de T.S. Tailer semblait plus active que sa vie sportive après ses fiançailles en novembre 1892. Le mail-coach The Rapid est parti aux USA le 29 août 1892, il est fort probable que T.S. Tailer l’a rebaptisé The Comet, mais l’a peu utilisé ensuite.
4 - THE TANTIVY/ LIBERTY / BAY-SHORE (?)
James Hazen Hyde (1876-1959), un jeune américain très fortuné, héritier de The Equitable Life Assurance, président et fondateur de la Fédération de l’Alliance française, était passionné par l’art de mener les attelages. Sorti d’Harvard, il arrive à Paris en 1899, il prend des cours d’attelage avec Howlett.
Le 9 octobre 1901, à l’âge de 26 ans, il bat le record de vitesse entre New-York et Philadelphie et retour New-York avec Alfred G. Vanderbilt (1877-1915) et Morris Howlett (1873-1939), à bord de son mail-coach Tantivy. C’est un succès incroyable, une foule considérable l’ovationne à son arrivée.Un chroniqueur français écrit deux mois plus tard : « Quant au mail-coach, acheté il y a deux ans à Paris par M. James H. Hyde, il n'a pas subi la moindre avarie." La voiture aurait été acquise en 1899. Un auteur américain précise que le Tantivy a été construit à Paris pour James G. Bennett qui l’aurait revendue. Plusieurs coupures de journaux dans l’album de souvenir sur le record[confié au Smithsonian], montre leTantivy, conforme au modèle du Herald, sauf le siège arrière du garde qui est double, mais reste arrondi avec sa jupe et sur le pavillon qui devient une impériale,une banquette supplémentaire qui regarde vers l’arrière.
LeTantivy a été commandé en 1892 par James G. Bennett à Guiet & Cie pour $1,600,qui le vend $800 en 1899 à James H. Hyde qui aurait ainsi pu essayer son premier mail-coach français.
En 1903, Hyde demande à Brewster& C° de le transformer en public-coach : pose d’essieux avec roulement à billes, un siège arrière supplémentaire pour la route, le siège double des gardes sur ferrures est remplacé par unebanquette classique sur hausses en bois. La capacité reste de 9 personnes à l’extérieur. Pour son nouvel usage, J. H. Hyde le rebaptise The Liberty et va assurer le trajet entre Holland House (NY) et Laurel-in-the-Pines, Lakewood, New-Jersey : 79 miles en 10h, à partir du 31 mars 1903.Le Liberty était assez léger avec 1,200 kg avec des roues de 4 feet(122 cm).
Mais un autre exploit est peut-être à mettre au créditde cette voiture. D’après K. E. Wheeling (Carriage Journal) et repris sur la notice du musée, le 20 juillet 1903, J. H. Hyde aidé du fidèleHowlett, est le premier à réussir la montée jusqu’au Grand Saint-Bernard en six heures avec sa voiture baptisée Bay-Shore, du nom de sa propriété à Long Island, USA.
Le voyage du Bay-Shore est aussi relaté dans La Revue hebdomadaire d’août 1903, mais sans faire de rapprochement avec le Tantivy ou The Liberty. Ce sont à notre connaissance les seuls articles de presse sur le mail-coach Bay-Shore.
Le reporter qui l’accompagne précise que« le mail-coach de M. James H. Hyde, Bay-Shore, a été construit par Guiet, qui s'est strictement conformé au modèle de l'ancien royal mail-coach anglais ». Ses « états de service sont : Paris – Bordeaux, Paris – Genève – Paris, Paris – Clarens ».
Le service entre Holland House et Lakewood a duré du 31 mars au 15 mai 1903 et l’excursion au Grand Saint-Bernard était le 20 juillet 1903, plus les trajets à travers la France, on peut s’interroger s’il est plausible que Liberty et Bay-Shore ne font qu’un.
Est-ce que leLiberty a retraversé l’Atlantique et pourquoi J.H. Hyde l’aurait de nouveau rebaptisé Bay-Shore ?
L’emploi du temps de James H. Hyde avant cette excursion, était assez dense. Arrivé au Havre le 11 juin, il est reçu le 27 juin par le ministre de l’Instruction publique, le 4 juillet il participe à un grand banquet à la Chambre de commerce de Paris. On imagine donc qu’une partie des « états de service » en France a été réalisée auparavant. Ayant vingt-cinq voitures dans sa propriété de Long Island, il pouvait avoir une seconde voiture Guiet à Paris pour éviter les risques liés aux démontages, transbordements et remontages. Les photos vers le col du St-Bernard ne permettent de voir si la voiture était déjà modifiée au niveau du siège arrière, ce qui aurait été un indice important.
Il faudrait avoir accès aux archives de J.H. Hyde au Shelburne Museum pour vérifier si le Bay-Shore et le Liberty sont un seul ou deux mail-coach différents. Le numéro de série serait aussi très utile.
La voiture mise en vente par J.H. Hyde chez Van Tassell& Kearney à New-York, le 20/11/1905, est achetée $700 par Paul R. Bonner, et revendue le 18/11/1913 par la même maison. En 1917-18, M. R. Crandall, son propriétaire a réalisé le trajet Buffalo – New-York. En 1949, elle est donnée par J. Ford Johnson de New-York à The Shelburne Museum qui l’a restaurée en 1971.
5 - MAIL-COACH N° 6800
Ce mail situé en Autriche, possède les caractères requis, mais le siège de garde rond a deux places, plus une banquette supplémentaire sur le pavillon devenant impériale. Les couleurs actuelles, noir et jaune pour la caisse, vermillon pour le train, ne sont pas d’époque, car il a été repeint vers 1970.Les garnitures des sièges ne sont pas anciennes. Le coffre arrière semble s’ouvrir par le dessus.La voiture possède 4 porte-lanternes, 2 sur la caisse comme sur les autres mails, plus 2 sur le siège du cocher.
L’intérieur de la caisse est en bois clair vernis. Sous la banquette arrière, il y a aussi un vase de commodité.
La voiture était dans la collection de Manfred de Diepold, mais les derniers propriétaires ne connaissent pas les origines plus anciennes.
Les chapeaux de roue sont marqués « MILLION&GUIET / PARIS » avec le n° 6800.Donc sa fabrication est un peu postérieure à celle du Herald.
6 - MAIL-COACH N° 7509
Cette voiture qui était dans les étables d’un château en Bretagne, a été récupérée après la dernière guerre, elle vient d’être racheté par les Écuries Hardy qui possède une collection très variée de voitures anciennes pour les tournages de film. Le mail a perdu son train, la caisse est en très mauvais état. Il conserve les couleurs traditionnelles de ses sœurs aînées, caisse noir, bas de caisse et siège avant rouge. L’intérieur est lambrissé en bois clair. A l’intérieur de chaque portière, une plaque en laiton marquée « MILLION-GUIET /PARIS ». Le numéro de série 7509 est peint au pochoir sur un panneau en bois et poinçonné à l’intérieur du levier de frein. Il y a environ une centaine de voitures de tous types qui séparent donc sa fabrication de celle du Herald, l’estimation de la datation est difficile car les commandes et la production n’étaient pas linéaires dans le temps.
Les deux ferrures à balustre fixées sur le coffre arrière sont pour un siège double de garde qui a disparu. Un coffre est accroché à l’arrière devant les gardes. Le coffre arrière s’ouvre par l’arrière et non par le dessus. Le siège de l’invité à côté du meneur ne possède pas le dossier surélevé visible sur les autres voitures.
Il existe encore au moins six mail-coaches fabriqués depuis le même modèle que l’Herald et construits a priori dans l’année qui a suivi la sortie de ce prototype.
Sur ce panel de six voitures existantes, nous avons des indices concordants qui permettent de rattacher quatre mails à leurs premiers propriétaires.
Notre objectif initial de retrouver les voitures commandées à la fin du record Paris – Trouville par J. Gordon Bennett, Suffern Tailer et Eugène Higgins semble atteint.
W. G. Tiffany propriétaire du Herald le cède rapidement à S. Tailer pour une raison inconnue.
E. Higgins baptise sa voiture Columbia et T.S. Tailer redonne le nom Comet au mail qui lui est livré.
Nous avons constaté que cet engouement c’est propagé à d’autres whip comme J. Hazen Hyde, E. de la Haye Jousselin et le prince de Galatro, sans encore connaître les autres coachmen séduits par ce nouveau modèle inspiré du mail-coach anglais.
Nous avons aussi retrouvé d’autres mail-coaches, mais sur des photos et dans un film.
LES VOITURES RETROUVEES EN IMAGE
7 - MAIL-COACH de Ferdinand Colonna, Prince de Galatro
Peu d’informations sur cette personne qui participa aux concours hippiques de 1892 et 1893. Son beau-père, J. W. Mackay, industriel américain fortuné était associé avec J. G. Bennett dans la Commercial Cable C°. Fin 1893, après la séparation demandée par son épouse pour son mode de vie dispendieux, il n’apparaît plus dans les manifestations hippiques.
On ne connait que deux belles photos prises par J. Delton sous deux angles différents, la première est parue dans La Photographie Hippique en 1893, la seconde dans Le Sport Universel Illustré en 1899. Delton et la presse étaient unanimes pour reconnaitre l’élégance de ses attelages « provenant d’écuries qui ont été les plus brillantes de Paris, sous la direction de Noto, aujourd’hui [nov. 1894] piqueur de l’Impératrice de Russie. »
Les panneaux et les coffres sont foncés, mais le bas de caisse en U, la coquille, le siège du meneur et ses hausses, le train et le timon ont la même couleur blanche. Le siège arrière du garde arrondi et double, le galbe des accoudoirs et le coffre du siège meneur sont typiques du style créé par Guiet & Cie avec le Herald. La devise familiale Semper Immota est peinte sur la frise des portes et sous la coquille.
8 - MAIL-COACH du comte Nicolas Potocki (1845-1921), président de la Société de l’Étrier
Ces photos prises place de la Concorde lors de la Journée des drags du 26.6.1914 montre sans conteste un mail-coach Guiet avec un siège de garde arrondi à deux places sur tripode, les volutes des accoudoirs et la boite du siège pour le whip.
L’annuaire Les Guides précise en 1899 : Comte Potocki, Coach par Million et Guiet : caisse bleu foncé, train de même, rechampi jaune ; les armoiries et la devise : Scutum opponbatscutis.
Cette description ne correspond pas à la photo faite quinze ans plus tard.
Il existe très peu de photos légendées « coach de comte Potocki ». Mais le journal L’Excelsior, montre le 27.6.1914, le même attelage avec les mêmes personnages, cependant pour la Journée des drags de 1913, le coach du comte Potocki est différent, caisse et train ont la même couleur, le levier du frein est différent, le siège des grooms est traditionnel. La célèbre photosignée Delton – 1886,du coach Potocki mené par la duchesse d’Uzès, montreun autre coach d’une couleur uniforme avec une caisse ronde. Le comte Potocki avait transformé son hôtel particulier au 27 avenue de Friedland pour assouvir ses passions, les remises abritaient 60 voitures et les écuries 38 chevaux. Il devait donc posséder plusieurs coaches de factures différentes.
9 - COUPE-MAIL GUIET & Cie
Les coupé-mail sont très rares, un bel exemple de restauration par Dieter Gaiser a été publié dans attelage-patrimoine sous le titre La renaissance du coupé mail n°268, construit par Binder à Paris.
Nous connaissons au moins trois photos différentes du seul coupé-mail Guiet connu à ce jour. Le brisement avant est très réduit et la porte est désaxée pour permettre la montée de deux passagers.
Sur la photo la plus nette, prise vers 1910 dans une grande avenue lors d’un Concours hippique au Grand Palais: les deux gardes sont sur un siège arrondi, il n’y a pas de banquette tournée vers l’arrière. La caisse semble noire, le bas de caisse, l’encadrement de la fenêtre, la joue de fond, la coquille, les hausses du siège avant et les caisses des sièges sont blanc. La couleur du train est claire, peut-être orange.
Le meneur et propriétaire est Philippe Bourcart(1868-1937), membre de la Chambre de commerce suisse, arrière-petit-fils de M. Dollfus-Mieg et gendre du président fondateur de Nestlé.
Sur l’autre photo, prise devant une maison, les parties blanches du coupé sont réduites au bas de caisse et à la fenêtre, le train semble plus foncé. La légende indique « Le coach de M. Franchomme ».
Hector Franchomme(1860-1939), industriel chocolatier dans le nord de la France, cavalier de très haut niveau, a possédé plusieurs voitures et était très attaché à l’attelage de tradition, il participait régulièrement à la Journée des Drags et aux concours hippiques. Il aurait initié le baron Casier dans l’art de mener un attelage.
Une peinture d’André Marchand et les autres photos connues avec H. Franchomme, montrent un coach classique toujours noir et blanc et un train vermillon, mais ce n’est pas le même coupé-mail.
10 - MAIL-COACH dans le film Madame de…
Lors d’une rediffusion récente du célèbre film avec Danielle Darrieux tourné en noir et blanc par Max Ophulsen 1953, l’apparition d’un mail-coach Guiet lors d’une chasse à courre, était une coïncidence inouïe. Le siège de garde double, les accoudoirs, les trois marchepieds à l’avant étaient bien visibles. La caisse était noire, les supports, la boite de siège du meneur et la joue de fond étaient blanc. Coïncidence ou preuve de concordance, la voiture possède une seconde banquette sur le pavillon, 4 porte-lanternes, 2 sur la caisse comme sur les autres mails, plus 2 sur le siège du cocher comme sur le mail n°6800.
Mais la voiture avec ses lanternes était conduite par un cocher et n’avait que deux chevaux ; l’authenticité historique n’était pas recherchée. Le générique ne précisait pas le propriétaire qui a loué son mail et il n’y avait pas encore de société de location spécialisée pour ce type de voiture. On sait seulement que le film a été tourné à Rambouillet, Versailles et Uzès.
LES VOITURES TROUVEES DANS LA PRESSE OU LA LITTÉRATURE
Un correspondant de l‘International Herald Tribune ayant écrit le 21 août 1892 :
« De nombreux membres de la communauté du coaching, plus particulièrement les Anglais, seront étonnés d'apprendre qu'une vingtaine de mails et de road coaches sont en cours de construction par une même firme parisienne en ce moment. C'est le premier résultat de la dernière saison du coaching sur route et le succès du voyage mémorable à Trouville. L'heureux constructeur du lot est la firme Million-Guiet. »
Il nous a paru utile de rechercher les propriétaires ou les mail-coaches commandés ou construits sur le modèle du Heraldre trouvés dans la documentation disponible.
Oliver-H.-P. Belmont, membre du Cercle des Guides et du Coaching Club of New-York.
Le New-York Heralddes 29.05 et 17.07.1892 annonce qu’il a commandéà Million-Guiet un coach identique au Herald comme Higgins et Tiffany. Les couleurs sont gardées secrètes, le coach est destiné aux États-Unis.
The Sirius à Sir James Gordon Bennett(1841-1918), propriétaire New-York Herald, vice-présdt. et fondateur du New York Coaching Club en 1875, membre Reunion Coaching Club de Paris.
Il sera le premier prêt à aller sur la route de Rouen, début août 1892, il ne reste à faire que la peinture. Seule différence avec le Herald est le nombre de passagers qui est de huit car le siège de garde est double et les banquettes débordent un peu pour avoir plus de place.
Carel du Ham dans Un nouveau sport – Le Coachting, Figaro du 16.10.1892,écrit :
« Et maintenant le coachting [sic] un sport qui a pris énormément d'extension. Ainsi rien que dans le hall d'un carrossier de l'avenue Montaigne, chez Guiet et Cie, on peut voir plusieurs voitures de ce genre, construites par eux.
D'abord un modèle absolument identique, à celui de la Royal Mail de Londres, voiture typique par sa forme et ses couleurs, qui doit faire partie des Réunions-coach et fera cet hiver le service de Nice à Cannes. Sur les panneaux, les armoiries si originales de M. Gordon Bennett. »
Ainsi le Comet ou le Meteor qui faisaient le service Nice – Cannes, pendant l’hiver 1891, devait être remplacé par un mail-coach ce qui est un peu étonnant pour un service assuré par des public-coach qui ont une capacité plus importante que les mail. Est-ce que le Sirius est devenu le Tantivy ou le nouveau Comet ?
Il est difficile de faire l’historique des nombreuses voitures du magnat de la presse. Une certitude, il connaissait très bien les fondateurs de Million-Guiet et Auguste Guiet. Il aimait particulièrement leurs voitures. Il avait acheté un mail-coach à l’Exposition de 1875 (Figaro) ; en 1876 il avait un drag Million- Guiet à New-York d’après The Hub qui racontait aussi qu’en 1876, il avait acheté 12 voitures Million- Guiet, représentant les principaux modèles différents.
The Rapid à T. Suffern Tailer
A ne pas confondre avec la voiture du même nom réalisée par Cowlard and Selby (Londres). Le journaliste le décrit dans les ateliers de Guiet & Cie. Il est peint avec les couleurs du Réunion Coach, caisse bordeaux, train rouge vermillon. Le nom est inscrit sur la coquille avec l’écriture du propriétaire, c’est la dernière mode et le résultat est très élégant. Le nom est aussi inscrit au dos du coffre arrière et le petit panneau de la fenêtre [la frise], il y a les lettres T.S.T., les initiales du propriétaire. Les autres inscriptions seront faites aux États-Unis, où la voiture part [le 29.08.1892] pour faire probablement le service entre Tuxedo et New-York et pendant la Foire Internationale, elle roulera hors Chicago vers un des country clubs. Nous avons expliqué plus haut qu’il avait probablement été rebaptisé Comet par T.S. Tailer puisqu’il disposait du nom après le don de J. G. Bennett, que les fabricants d’un autre Rapid se plaignaient, et qu’il n’y a pas d’informations visibles sur The Rapid après son service pendant les courses à Morris Park en octobre 1892.
Si nos lecteurs ont des informations ou indices pour retrouver d’autres voitures Million-Guiet ou Guiet & Cie, nous les exploiterons avec un vif intérêt pour compléter cette enquête et le répertoire des voitures fabriquées par cet important constructeur. Nous continuerons ainsi cette coopération franco-américaine et franco-européenne qui a permis le développement du coaching à travers l’Europe et l’Amérique.
Cette enquête nous rend aussi très modeste et nous rappelle que les coaches ont eu plusieurs vies et souvent plusieurs costumes.
REMERCIEMENTS
SOURCES